lundi 29 août 2011

LE CINÉ DE L'ÉTÉ (6). Une Séparation

Dernière étape de ce "Ciné de l’été", c’est pourtant un film sorti juste avant les grandes vacances qui va clore nos projections estivales.

Une session de rattrapage dû à l’exceptionnel succès public dont bénéficie "Une Séparation" le film d'Asghar Farhadi, un évènement encourageant pour un film iranien sans vedettes, preuve que la qualité et le bouche-à-oreille paient.
Basé sur un scénario d’une grande maîtrise et intelligence, "Une Séparation" est un film d’une rare subtilité, tour à tour thriller familial, autopsie de la rupture d’un couple, documentaire sur la justice ou analyse de la société iranienne.

Plongée dans le quotidien d’une famille de la classe moyenne dont le couple central se sépare douloureusement, "Une Séparation" expose les diverses strates d’un Iran en mutation opposant cette famille de la classe moyenne à un couple de la classe pauvre.

La plainte déposée par la discrète Razieh (Sarah Bayet), contre le jeune cadre Nader (Peyman Moadi), qu’il employait comme aide domestique et dont elle l’accuse d’être responsable de la mort de son enfant non encore né, ouvre une enquête judiciaire qui reflète autant les tensions qui agitent l’Iran moderne que les plaies conjugales ouvertes au sein du couple vacillant de Nader et de Simin (Leila Hatami).
L’abandon d’un projet commun, le ressentiment, la perte de confiance érodent leur amour autant que la question religieuse, la pression islamique ou la frustration économique divisent les diverses couches de la population de Téhéran.

La réussite éclatante d’Asghar Farhadi déjà réalisateur de "La Fête du Feu" et du brillant "À Propos d’Elly" tient dans l’entière réussite de son dispositif filmique, suivant pas à pas les fait et gestes de chacun de ses personnages, plaçant le spectateur au cœur de chaque scène, exposant tel un kaléidoscope les points de vue des différents protagonistes.








Miracle discret d’une réalisation précise qui jamais ne se fait sentir, au plus près des émotions de ses acteurs (tous étonnants), et d'une belle mise ne scène cernant ses personnages derrière des vitres ou des portes. Autour des nombreux rebondissements de son intrigue palpitante comme celle d’un polar la plus-value d’"Une Séparation" est la constante humanité de son regard, qu’il capte la dignité blessée de Razieh, femme contrainte par l'honneur de son mari revendicatif ou le désarroi de Termeh, la jeune fille du couple, déchirée entre ses deux parents.

L’harmonie de ce film, digne et touchant comme la tragédie qu’il dépeint, réside dans cette multiplication subjective des raisons et motivations de chacun, exposant sans manichéisme la complexité au coeur de tous les êtres humains, mus par des motivations contradictoires selon les évènements et la société qui les entoure.

Réussite à tous les niveaux donc, qui jamais ne tombe dans le film-dossier ou le démonstratif, c'est surtout la réussite d'un cinéma alliant exigence d'auteur et souci constant du spectateur. "Une Séparation" ainsi s'ouvre et se ferme par un plan qu'on pourrait croire jumeau, filmé dans le bureau du juge, mais ses personnages ont accompli un passionnant voyage entre ces deux extrémités...

"Une Séparation" (Iran, 2011).
♥♥♥♥

Réalisation et scénario : Asghar Farhadi. Directeur de la photo : Mahmood Kalari. Compositeur : Sattar Oraki . Production : Negar Eskandarfar. Distribution France : Memento Films. Durée : 123 mn. Ours d'Or du Festival de Berlin 2011
Sorti le 8 juin

Avec : Leila Hatami (Simin) ; Peyman Moadi (Nader) ; Shahab Hosseini (Hodjat) ; Sareh Bayat (Razieh) ; Sarina Farhadi (Termeh).



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On n'en pas fini avec le cinéma ! Demain, petit exercice de choix de films personnels.

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