dimanche 27 novembre 2011

SYD MATTERS EN LIVE. Merci, Mr Morali !



L'existence d'un blog est une course de fond, non exempte d'incidents et d'arrêts imprévus. Plus de dix-sept jours de break momentané, un trou d'air de saison occasionnel qui nous envoie déjà à la fin du mois de novembre.

Et c'est donc à l'occasion d'un concert hier soir, ma deuxième virée passée à La Sirene, que le blog se réveille de sa torpeur passagère. Un concert de Syd Matters, mais quel concert ! Bon, commençons par le début car la soirée pop rock rochelaise s'est déroulée en trois temps.

D'abord le quatuor des Kid Bombardos, petits voisins bordelais qui ont ouvert les hostilités avec l'énergie qui caractérise leur jeune âge. Et admettons que le groupe des frangins Martinelli se tient bien en scène, endroit qu'ils connaissent manifestement comme leur poche. Leurs pop songs charnues et électriques et leur look rétro constituent un apéritif sympa, à défaut d'être original :



Avouons juste que, malgré l'excellence de leur bassiste et leur jeu de guitares furibardes, malgré tout l'engagement scénique dont ils font preuve, le set s'avère un peu lassant, lorgnant sur les sixties et le rock limité des Strokes, pour finir au fond par sonner comme une version hexagonale des Vampire Weekend ou Two Door Cinema Club. Quand en plus, on n'est pas très sensible au phrasé anglais très chewing-gum de Vincent Martinelli. Ceci dit, vu leur âge et leur fougue en scène, je présage que ces kids là ont toute la ressource de me convaincre dans la suite de leur parcours.

myspace kid bombardos

Puis vint le tour des Rouennais de Tahiti 80, le groupe de french pop qui mériterait d'être aussi célèbre que Phoenix, ou au moins, de connaître une part de la reconnaissance médiatique (exagérée) qu'on accorde aux versaillais.

Véritables champions de feel good music, difficile de résister au vraies bombes sunshine pop du groupe du sympathique Xavier Boyer, dont la récente approche électro n'a fait que bonifier leur pop fruitée et mélodiquement irrésistible. Quand en plus le gang fait preuve d'une évidente aisance scénique, aucune raison de bouder son plaisir :



Hélas, c'était sans compter sans l'apathie ou l'indifférence d'une partie du public qui les toisait avec l'air blasé d'un troupeau de bestiaux regardant passer un TGV. Ainsi, une certaine qui regardait en coin d'un air navré ma tentative personnelle de danse improvisée d'un air quasi attéré.
Réflexion tardive
: "Si tu viens au concert pour faire la gueule, même quand les artistes sont bons, fallait pas venir, Machine !"
"Vous allez l'air sage, trop sage!" lança un Xavier Boyer conscient du problème, plutôt piqué et semble-t-il agacé par l'obligation de terminer à un horaire imposé. Décidés à les faire bouger, le gang enchaîna avec un choix imparable de machines à danser (Gate 33, Darlin', Crack Up). Mais cette dernière n'ayant, à ma grande surprise, pas encore réveillé les endormis, Boyer & co ont semblé rendre prématurément les armes, ce que je comprends dans ces circonstances, et sans aucun rappel, que ce petit public de zombies ne méritait d'ailleurs pas.
Du coup, tout le monde en a été privé. C'est pas juste pour les autres, dont moi !

tahiti 80

Le temps d'un nouveau (et bien long) changement de matériel, j'en vins à m'interroger sur la suite : est-ce que cette attente valait le coup? Avais-je bien fait de vouloir voir Syd Matters en scène?

Autant dire que dès que l'obscurité s'est faite, à peine éclairée d'une petite lumière bleue aquatique et que les premières mesures de "River Sister" ont résonné, le climat change et le niveau monte d'un cran. Plus de questions, la certitude d'être au bon endroit, au bon moment, et de voir des artistes légitimes dans la pleine mesure de leur talent :



Si le folk-pop rigoureux et inventif de Syd Matters charme déjà sur disque (le génial "Brotherocean"), les voir en scène constitue un vrai aboutissement. Voir chanter Jonathan Morali avec une rare intensité, les yeux fermés comme plongé dans son monde intérieur, envoûte par son caractère spirituel qui impose l'exigence à tous. Light show inspiré, son parfait, musiciens concentrés, choeurs chaleureux, section rythmique d'enfer, compositions habitées : de la pure magie, un vrai moment de grâce étonnant.

Jonathan Morali semble investi dans chaque mot de chaque chanson, et quelles chansons ! Intimes, fluctuantes, émouvantes, complexes et limpides à la fois, l'énergie de la scène leur confère une dimension supplémentaire et une électricité rock insoupçonnée en studio.


















Alternant épure acoustique, digressions instrumentales dignes des meilleures heures du prog rock et longues boucles guitaristiques ou variations électro aux vertus psychédéliques, Syd Matters impressionne par sa force tranquille, sa puissance de feu et laisse muet plus d'une fois (somptueux "Obstacles" ou "I Might Float", au hasard) :





Un moment en apesanteur, où la gravité perce sous la douceur, l'euphorie sous la mélancolie, rempli des regards de connivence de Morali vers ses quatre complices et de son émotion lors d'un double rappel triomphal et bluffant de beauté. Dignes enfants de Pink Floyd, cousins hexagonaux de Midlake mais surtout de Radiohead, voilà, à mon humble avis, le plus grand groupe français actuel en activité.

Dont je ne remercierai jamais assez l'actuelle prestation. Surtout pour nous rappeler combien il est bon, dans une époque de faux-semblants et de vrais blasés, de se retrouver en position d'admiration devant le talent de vrais artistes, une sensation rare pour un plaisir réconfortant.

Des étoiles dans les yeux, bien qu'à moitié sourd après le concert, je cours récupérer une affiche du groupe. Derrière moi, deux couples commencent à s'échauffer, l'un reprochant à l'autre d'avoir parfois parlé et ri trop fort lors du set, même lorsque les morceaux ne s'y prêtaient pas :
"- Ça, on peut dire qu'on vous a entendu, vous !"
"- Comment, on doit se taire? C'est la messe, c'est Dieu, Syd Matters ?"

Même ridicules et inappropriées, ces interventions n'avaient pourtant pas réussi à briser l'harmonie de ce rendez-vous entre ciel et terre, air et eau, ombre et lumière.

Un moment qui restera comme un des meilleurs concerts que j'ai vus, un instant protégé par la bulle aérienne du monde de Syd Matters. Vous savez ce qui vous reste à faire si d'aventure ils passent près de chez vous : y courir sans hésitation !

"Brotherocean" en écoute sur spotify

syd matters
la sirene

Merci sincère aux lecteurs et blogueurs amis (Christo, Benoit, Joris, Muffin Man, Charlu, Vincent et les autres) quand l'envie s'essouffle parfois, pour me redonner régulièrement envie de repartir. Thanks a lot !

3 commentaires:

  1. SYD MATTERS, meilleur groupe français en activité ? Oui, sans conteste : discographie impeccable et des concerts toujours EXCELLENTS ! J'ai dû les voir sur scène au moins à huit reprises depuis 2005, et jamais ils ne m'ont déçu ! La dernière fois, c'était à Mâcon (juste une semaine avant La Rochelle) : quel merveilleuse prestation ! (Je pense qu'on a eu la même setlist : "River Sister" pour débuter, "Obstacles" à la fin + "My Lover's On The Pier / It's A Nickname / Me & My Horses" en rappel -de mémoire-)

    P.S. : je me joins aux autres fidèles lecteurs pour t'exhorter à ne surtout pas te garer sur "le bord de la route" (allusion au dernier billet de Dragibus...)

    RépondreSupprimer
  2. Eh, eh, oui, content de te voir de retour.
    Pas facile en effet de garder toujours le rythme et la motivation pour écrire. Sinon, entièrement d'accord concernant Syd Matters, meilleur groupe français actuel. "Brotherocean" était même mon disque de 2010 et je garde un super souvenir de leur dernier passage à l'Olympia.

    RépondreSupprimer
  3. @J.P. : bravo pour ta rapidité! Et ton éloge de Syd Matters, définitivement à voir en scène, hein (remarque destinée à ceux qui liraient ce commentaire, s'il y en a).
    Toujours sur un petit nuage depuis samedi soir, ça fait un bien fou... A bientôt de te recroiser :)

    @vincent : merci, m'sieur !
    J'ai relu ta chronique quand tu les avais vu l'an dernier à l'Olympia, tu avais raison sur tout. Et j'ai quand même été bluffé !
    Vraiment, il faut aller les voir, hein, les-gens-qui-les-ont-pas-vus-encore, faut y aller ;)

    À + :)

    RépondreSupprimer