vendredi 11 mars 2011

POP. Les rêveries estivales de SIN FANG

Parfois, vous avez beau lutter, vouloir vous échapper, mais souvent un disque s'impose à vous avec une évidence qu'il serait inutile de vouloir combattre. En lieu et place de disques moyennement emballants, réservons donc à ce "Summer Echoes" en avant-première la première place qu'il occupe depuis qu'il est passé par mes oreilles et ne les quitte pas depuis.

Parfois un disque ne se limite pas à une collection de chansons alignées à la suite les unes des autres. Parfois c'est entreprendre une excursion dépaysante pour une destination inconnue sans repère très familiers et s'y trouver pourtant très vite à l'aise.

Écouter "Summer Echoes", c'est partir pour le monde aérien, mouvant et planant d'un magicien dont la pop cotonneuse et sinueuse vous réservera le plus dépaysant des voyages immobiles. C'est pénétrer dans les méandres de chansons comme si on pénétrait dans les recoins du cerveau de son auteur et y retrouver contre toute attente un peu de soi-même.

Déjà quelques années que les amateurs de pop nordique connaissent les vertiges musicaux du lutin islandais, grand enfant prompte à se déguiser volontiers, autrefois dénommé Sin Fang Bous, raccourci pour ce deuxième opus en Sin Fang. Que ce soit sur les albums de son groupe Seabear ou son ludique premier album "Clangour" de 2009, l'énergumène déploie un langage musical au codes pourtant connus : la pop-folk lo-fi vaporeuse et bricolo, typique des artistes indépendants de ces régions nordiques.

Et avec "Summer Echoes", même si on croit connaître souvent le chemin, les panoramas rencontrés une fois arrivés vous semblent étonnamment tout neufs.

Pourtant, avec les deux premiers titres aux airs de lambeaux vaporeux de dream pop, le trip commence plutôt sans relief. Et puis, "Fall Down Slow" déboule avec son évidente luminosité bizarroïde (termes contradictoires, mais écoutez-la donc) et vous captive.
Une magie confirmée par la fabuleuse "Because Of The Blood", tintinabullante et irrésistible avec ses choeurs élégiaques dignes de Fleet Foxes brumeux ou d'Animal Collective acoustiques. Et le disque s'envole alors sans jamais baisser d'intensité.



À quoi doit-on la réussite de ce philtre pop unique ? À la production inventive et minutieuse, de cette pop moins bricolo-enfantine que son précédent LP mais divinement électro-acoustique, élaborée avec ses potes de Mùm dans les studios des célèbres Sigur Rós ?

À la construction évolutive, parfois expérimentale et pourtant finement architecturée des ses pop song décalées ? À ces vocaux aériens filtrés, entre Beach Boys venus du froid et Belle and Sebastian excentriques ? À cette liberté musicale toute-puissante dont fait preuve Sindri Már Sigfússon (a/k/a Sin Fang) comparable à celle du gamin créant des mondes fabuleux dans ses gribouillages d'enfant instinctif ?

À cet esprit ludique qui le voit sur "Rituals" s'aventurer sur des terrains voisins de l'afro-pop tendance Vampire Weekend-Fool's Gold, esquisser une rythmique hip-hop sur "Sing For Dream" et zébrer ses comptines réverbérées de riffs électriques énergisants un peu partout (Fall Down Slow, Nothings) ?

Sin Fang - Nothings

Sin Fang - Always Everything

Qu'importe : "Il ne faut pas chercher à dévisager l'ange qui vous a décoché une flèche" aurait dit un poète (ne me demandez pas lequel, j'ai oublié). L'important est la réelle euphorie procurée par cette précieuse rêverie, nuage musical vaporeux et organique à la fois, culminant sur la mélancolique et éthérée "Two Boys" :



Enfant terrible à la créativité radieuse, le farfadet Sin Fang en petit Beck du nord, signe un album addictif, un des vrais bons disques de ce début 2011 et petit chef-d'oeuvre que je conserverai précieusement aux côtés de l'indispensable "Dear John" (2009) du suédois Loney Dear, du premier album de la chorale pop alternative I'm From Barcelona (2006) ou du délicieux "Weathervanes" (2009) des Freelance Whales.











Autant de raccourcis immédiats pour une précieuse ascension vers de radieux cieux pop.
En bonus : Une reprise inédite parfaite (absente de l'album) du classique de Simon & Garfunkel "The Only Living Boy In New York" :



Tracklist :
1. Easier
2. Bruises
3. Fall Down Slow
4. Because Of The Blood
5. Rituals
6. Always Everything
7. Sing From Dream
8. Nineteen
9. Choir
10. Two Boys
11. Nothings
12. Slow Lights

Sin Fang. "Summer Echoes" (Morr Music) ♥♥♥♥ Album à paraître le 16 Mars

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7 commentaires:

  1. Houaou il y'en à qui on de la chance. Je suis un grand fan du premier album et attend impatiemment le 16 pour me délecter du second album de Sin Fang sans le Bous.

    Merci en tout cas pour tout ces morceaux en avant première de l'homme à la barbe dentelée.

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  2. Ben tu vois, autant j'avais adoré le précédent autant là je trouve que ça tourne vite en roue libre et qu'il n'y a plus la fraicheur d'avant. c'est du bon boulot, mais bon, c'est un disque que j'ai du écouter 5 ou 6 fois, e il ne m'en reste rien. Ca veut pas rentrer.

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  3. @ yann : merci pour ton commentaire enthousiaste, j'espère que ce nouvel album te plaîra autant qu'à moi :-)

    @benoît : bon comme quoi les ressentis sur les albums sont vraiment différents !
    J'avais bien aimé son premier très sympa, mais celui-là il me touche plus .. au début pas vraiment j'avoue et puis depuis cette fin de semaine, un truc se passe, il ne me sort pas de la tête, un vrai coup de coeur.

    C'est mystérieux parfois pourquoi un disque vous emballe et pas un autre...

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  4. Rah, beaucoup trop p(r)op(re) pour moi ^^'

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  5. De la pop magique et addictive comme ça, moi j'en redemande, docteur ;-)

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  6. Hello Blake.

    Je n'ai pas encore écouté le travail Sin Fang (ou Sin Fang Bous avant) mais j'avais repéré ce "Summer Echoes" (édité de plus chez l'excellente maison Morr Music). De plus, je connais bien Seabear. J'aime "The Ghost That Carried Us Away" de 2007 et l'excellent "We Built A Fire" sortie en 2010 mais découvert récemment.
    Les extraits en écoute confirme la bonne santé de sa musique : mélange réussi de folk et de pop lo-fi, planant, psychédélique et onirique, rempli de tendresse, de poésie et de trouvailles sonores inouïes.
    Le mariage superbe de l’électronique et de l’acoustique !

    Sindri Már Sigfússon nous invite donc à un voyage aux pays des rêves, de ses rêves et espoirs personnels mais dans lequel l'auditeur "lunaire" (dont je fais parti) peut facilement s'y plonger.
    En cela, il me rappel un autre véhicule onirique inouï pour (grand) enfants : CocoRosie !! Mais, malgré tout l’immense respect que je leur porte, je me demande si ce n’est pas le groupe d’un seul disque, comme si CocoRosie et "La maison de mon rêve" ne devrait être qu’un seul et unique projet…..mais quel projet !!!!
    La photo où cet artiste est comme recouvert d'un masque organique et végétal vert est tellement splendide que, bien que la pochette de "Summer Echoes" soit très belle, elle aurait pu magnifique l'a remplacer !!

    A + et merci pour l'écoute.....

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  7. @francky : voilà "lunaire", tu as trouvé, c'est le mot ... pour cet album de Sin Fang, et peut-être aussi pour l'auteur même de ce blog ;-) Peut-être devrais-je créer un "club des lunaires" ?

    Merci de ta visite et, comme toujours, de tes commentaires très généreux :-)

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