samedi 29 octobre 2011

Le traitement du bon dr JONATHAN WILSON

On croirait que ce disque a été conçu exprès pour m'accompagner toute cette semaine qui m'a vu diminué par un vilain rhume. Je n'évoque pas ici mon état de santé pour me faire plaindre (d'autant que ça va mieux, merci), mais pour vous donner une idée du caractère salvateur de la musique de Jonathan Wilson, entre torpeur enfiévrée et échappée sous des cieux plus favorables, exactement comme quand votre corps et votre esprit marchent légèrement au ralenti, touchés par un méchant virus.

Mais qu'importe, quand le traitement vous permet de succomber à un lumineux "Desert Raven", meilleure carte de visite du docteur Wilson :



"Gentle Spirit", un titre on ne peut plus adéquat pour un album qui fait revivre à merveille tout l'esprit d'une période révolue (la fin des sixties) et d'un lieu, le Laurel Canyon près de Los Angeles, sorte d'eden peace and love pour musiciens cools de l'époque (Joni Mitchell, Neil Young, James Taylor, The Byrds entre autres).

Comme une photo sépia mordorée, le premier album solo du quasi inconnu Jonathan Wilson, installé presque par hasard dans la région, ressuscite tout le parfum d'une musique west coast encore enivrée par le flower power, sa coolitude langoureuse et son charme boisé et acoustique (The Way I Feel) ou ses longues digressions très psychédéliques (Natural Rhapsody) :



On pourrait à juste titre lui reprocher de se tenir tellement près de ses modèles (Crosby, Stills, Nash & Young, Jackson Browne, Crazy Horse, voire Pink Floyd), dans l'écriture jusque dans le son rempli à foison d'orgues et de guitares vintage, que l'ensemble pourrait juste se résumer à un exercice de style "à la manière de", durée à rallonge de certains titres y comprise.
Un reproche sans importance quand on vous dira que ce disque est tout simplement beau. Parfois inégal, mais souvent inspiré mélodiquement (Rolling Universe, Waters Down, Magic Everywhere) et témoignant d'un vrai attachement aux vertus d'un folk grand ouvert entre tradition revisitée et hommage sincère.

Pris au jeu, l'ami Wilson recrée depuis à sa façon l'esprit d'échange et de partage du Laurel Canyon grande époque, pour des soirées inter-générationnelles entre jeunes musiciens (Vetiver, Wilco) et anciennes gloires (Graham Nash ou Barry Goldberg, un ex-accompagnateur de Dylan).
Bon témoignage de la vitalité de la jeune génération folk U.S., son élégant "Gentle Spririt" signé sur le toujours clairvoyant Bella Union est emblématique du genre, une bonne surprise à ranger entre les derniers opus de Junip, des Fleet Foxes ou des Vetiver d'Andy Cabic.











Un remède musical d'époque qui permet de reprendre sa place en douceur parmi les vivants, même si certains, je le devine, risquent de le trouver éprouvé, trop utilisé ces temps-ci et plus très neuf, mais pour ma part, toujours efficace et curatif.
Comme l'a bien exprimé chez lui l'ami Muffin Man : "Ça sent le vieux et j'aime ça", auquel je me permettrai juste de rajouter : "Et ça fait rudement de bien !"


Jonathan Wilson - Rolling Universe


1. Gentle Spirit
2. Can We Really Party Today ?
3. Desert Raven
4. Canyon In The Rain
5. Natural Rhapsody
6. Ballad Of The Pines
7. The Way I Feel
8. Don't Give Your Heart To A Rambler
9. Woe Is Me
10. Waters Down
11. Rolling Universe
12. Magic Everywhere
13. Valley Of The Silver Moon

Jonathan Wilson. "Gentle Spirit" (Bella Union) sorti le 03 octobre 2011
♥♥♥♥
en écoute sur deezer & spotify
3 titres sur la Playlist Pop
article sur télérama et un papier documenté sur Laurel Canyon chez les inrocks
à lire chez muffin man

Jonathan Wilson.com
bella union

dimanche 23 octobre 2011

Memory Of The 80's (20). THE DURUTTI COLUMN

Nouveau souvenir pour un "Memory Of The 80's" dont la musique paraît avoir été inventée exprès pour célébrer l'automne, sa splendeur douce-amère, sa douceur tranquille avant l'engourdissement progressif par l'hiver. Une des figures les plus obscures de la new wave britannique à l'oeuvre pourtant pléthorique, aussi discrète que pourtant essentielle, The Durutti Column.

The Durutti Column ou le groupe d'un seul homme, instrumentiste atypique et guitariste virtuose, autrement dit, Vini Reilly. Éthérée, cotonneuse et intimiste, sa musique fragile distille un charme persistant, aussi tenace aujourd'hui qu'il le fut à l'orée des années 80.

En témoigne "Never Known", sans doute un des plus beaux morceaux instrumentaux de l'histoire, avec ses cascades d'arpèges tournoyants et désolés, présent sur le mythique album "LC" paru il y a exactement 30 ans :



Une exception à lui tout seul que Vincent (dit Vini) Gerard Reilly, devenu guitar héros d'un mouvement cold wave qui avait pourtant le culte de cet instrument en horreur.

Musicien autodidacte à l'allure inquiétante de brigand moyenâgeux ayant développé un jeu de guitare empruntant au jazz, alors découvert par le manager Tony Wilson et produit par Martin Hannett, Vini Reilly est un fleuron de l'époque légendaire de la Factory période Joy Divison et le son de Durutti Column était un véhicule parfait pour son âme tourmentée, tentée par la dépression et l'anorexie.

Pourtant bien que profondément mélancolique, The Durutti Column (ainsi nommé en hommage aux révolutionnaires espagnols de 1936) avec son minimalisme ascétique hérité du post-punk, distille un étrange sensation d'apaisement, de recueillement introspectif et de délicatesse diaphane qu'ont peut aussi résumer sous le simple terme de beauté.



Dès son premier opus de 1980 "The Return of The Durutti Column", l'anglais avait posé les bases de son univers musical : section rythmique imperturbable, piano évanescent, effets électroniques, réverbération de cathédrale. Tous placés autour du son de guitare hypnotique, souple et cristallin qui habille d'une langoureuse majesté les plages souvent instrumentales de cet album fondateur, sur laquelle se pose parfois (rarement) la voix fantomatique comme absente du musicien.

Un nouveau genre à lui tout seul, entre ambient alternative, cold wave introspective et new wave automnale, déjà arrivé à sa perfection sur "LC" en 1981.

Bien que farouchement indépendant et à la tête d'une rebondissante carrière - plus d'une bonne trentaine d'enregistrements dont certains pour le défunt label belge "Les Disques du Crépuscule" - le surdoué solitaire Vini Reilly a depuis longtemps reçu l'hommage de ses pairs.

Ainsi, Brian Eno jure que "LC" est son album préféré de tous les temps, John Frusciante (Red Hot Chili Peppers) le tient pour le meilleur guitariste vivant et Martin Gore de Depeche Mode a reconnu son influence en reprenant son magnétique "Smile In The Crowd" sur son célèbre premier album de reprises, "Counterfeit" :





La discographie de The Durutti Column, riche et multiforme sous son apparente uniformité, à la lisière de nombreux genres, de l'expérimentation à l'électronic, reste encore à explorer. Même si on peut avouer un attachement particulier à sa première période dont les trois opus inauguraux "The Return of The Durutti Column" (1980), "LC" (1981) et "Another Setting" (1983) représentent le trio gagnant, entre splendeur minérale, invention musicale et intemporalité esthétique.












Une intemporalité toujours de mise puisque la jeune génération reconnaît à son tour son héritage : le chanteur des Drums Jonathan Pierce le citait dans Magic comme modèle d'intégrité et les MGMT l'ont salué en incluant un de ses titres sur leur récente LateNightTales.

Quand, en plus, la compilation toute fraîche "Fac. Dance" ressuscite les grandes heures de la Factory de Manchester (à lire sur Pop Revue Express), devinez qui trouve-t-on au détour des plages entre New Order et autres Section 25 ?

The Durutti Column
et son spleen atmosphérique aussi troublant en 2011 qu'il le fut il y a trente ans. Comme une bulle de tristesse apprivoisée aspirant au calme et au silence dans un monde bruyant et trop agité.



Tracklist :
1. Sketch For Dawn
2. Portrait For Frazer
3. Jacqueline
4. Messidor
5. Sketch For Dawn II
6. Never Known
7. The Act Committed
8. Detail For Paul
9. The Missing Boy
10. The Sweat Cheat Gone

"LC" (1981) ♥♥♥♥
The Durutti Column sur spotify & deezer et l'album "Another Setting" sur spotify

titres en écoute sur la Mini Playlist 80's
résumé de parcours sur Rhâââlovely
critiques de "LC" sur xsilence.net et inside rock

The Durutti Column.com

Factory Records

vendredi 21 octobre 2011

REPLAY 2011 (2). THE PHOENIX FOUNDATION

On poursuit la petite rubrique "Replay" afin de ne pas oublier les bonnes surprises de l'année non encore traitées ici.
Ainsi, il aurait été dommage de ne pas évoquer la dernière livraison d'un groupe venu de Nouvelle-Zélande, stars chez eux et encore trop méconnus chez nous, The Phoenix Foundation.

Une joyeuse bande menée par Samuel Flynn Scott, dont le dernier album "Buffalo" fut le premier à atteindre nos contrées alors que c'est déjà leur quatrième. Et qu'il est urgent enfin de dire partout tout le bien que méritent ces précieux mélodistes pop, au charme immédiat entre psychédélisme intemporel et électro ludique.
Impossible de résister à leur hymne "Buffalo", à rendre jaloux MGMT, une bombe pop au gimmick électro-rock en boucle, qui aurait méritée d'être la bande-son indie de l'été :



Et au-delà, car The Phoenix Foundation est bien loin d'être le groupe d'une seule chanson ! Plutôt de brillants alchimistes capable de mélanger sunshine pop digne des sixties (Pot), héritage d'orfèvres mélodistes dignes de leurs ancêtres australiens Go-Betweens ou des anglais de House Of Love (Bailey's Beach) et cousinage électro pop ludique (Skeleton).
Comme des Flaming Lips qui joueraient avec des Animal Collective décontractés.

Pop moderne ayant digéré le passé et tournée vers le futur, la musique des néo-zélandais est d'une constante séduction, autant joueuse que romantique et d'une parfaite luminosité.

Dix titres d'une partageuse fluidité et spatiale zénitude bercés par le timbre tranquille de crooner indie de Samuel Flynn Scott, un vrai havre de félicité qui gagne en qualité au fur et à mesure des écoutes. Je vous défends de ne pas avoir le sourire aux lèvres à l'écoute de perles comme la joviale "Pot", la craquante "Wonton" ou la fantaisiste "Orange & Mango" :


De quoi donner envie sur le champ, sinon de déménager en Nouvelle-Zélande (quoique...), mais surtout de se plonger dans la discographie d'un groupe qui n'a vraiment rien à envier à ses cousins américains, je songe aux Freelance Whales ou autres Local Natives.
Et qui devraient - du moins pour ceux qui l'auront écouté - se retrouver en position enviable dans les palmarès de fin d'année.

Comment ça, on s'en rapproche à grands pas, déjà ? Vite, un petit coup de The Phoenix Foundation pour me remonter le moral !


The Phoenix Foundation - "Bitte Bitte"

Tracklist :
1. Eventually
2. Buffalo
3. Flock Of Hearts
4. Pot
5. Bitte Bitte
6. Skeleton
7. Orange & Mango
8. Bailey's Beach
9. Wonton
10. Golden Ship

The Phoenix Foundation. "Buffalo" (Memphis Industries/PIAS)
Sorti le 10 janvier
♥♥♥♥

à écouter sur deezer & spotify et en version DeLuxe avec titre bonus
3 titres sur la Playlist Replay 2011
à lire sur benzine, hop blog et article sur les inrocks

The Phoenix Foundation

jeudi 20 octobre 2011

YANN TIERSEN au ciel

Pas de crainte à avoir malgré l'intitulé ambigu de ce billet, l'ami Yann Tiersen est bien toujours parmi nous ! Voire même plus que jamais puisqu'à peine un an après son dernier album, l'excellent "Dust Lane" (lire ici) sur l'historique label anglais Mute, le voici déjà de retour avec "Skyline".

Manifestement regonflé par l'expérience et la tournée qui s'ensuivit, l'instrumentiste continue son exploration en musicien libre et inclassable. Pour un opus court et ramassé dans la même mouvance, entre pop éthérée et post-rock à tendance noisy, une couleur parfaitement résumée dans l'explosif titre d'ouverture aux accents shoegaze, "Another Shore" :



Mais comme c'était déjà le cas avec "Dust Lane", le breton ne suit que sa propre humeur, entraînant autant l'auditeur sur des plages accueillantes et légères (I'm Gonna Live Anyhow, Monuments) que l'abandonnant en zone de turbulences intenses (déroutant Exit 25 Block 20) ou pièce instrumentale éthérée (épanoui The Trial).

Développant en solitaire bien entouré (Olavur Jacobson d'Orka, le remixer Ken Thomas) son croisement très personnel entre musique instrumentale et influences indie rock à l'orchestration épurée ou énergique, Yann Tiersen affiche une belle santé créative, en pleine possession de ses moyens, en équilibre entre formats pop et climats changeants flirtant à l'occasion avec l'expérimentation.



Une suite logique qui n'atteint cependant pas l'intensité radicale et mystérieuse de "Dust Lane" mais s'avère toutefois un excellent cru du breton,
à mettre en haut de sa discographie. Une étape de plus dans un parcours de plus en plus impeccable et singulier. Prêt au décollage ?

Tracklist :


1. Another Shore
2. I'm Gonna Live Anyhow
3. Monuments
4. The Gutter
5. Exit 25 Block 20
6. Hesitation Wound
7. Forgive Me
8. The Trial
9. Vanishing Point

Yann Tiersen. "Skyline" (Everything's Calm/Mute) Sorti le 17 octobre 2011
♥♥♥♥
à écouter sur spotify & deezer
3 titres sur la Playlist Pop
à lire sur bon pour les oreilles et hop blog

Yann Tiersen.com

mercredi 19 octobre 2011

LE CINÉ SUREXPOSÉ. Polisse

Ce n’est pas un mal que le dernier film de Maïwenn soit enfin sorti cette semaine sur les écrans tellement on en a entendu parler sous toutes les coutures depuis Cannes.
Une surexposition médiatique, comparable à celle de "La Guerre est Déclarée", le film de Valérie Donzelli, partie d’un bon sentiment (l’emballement spontané de la critique) mais tellement intensive qu’elle a de quoi être contre-productive.

Maintenant visible par tous, "Polisse" appartient au public assez grand pour juger par lui-même, et nul doute qu’il aura un certain impact sur ce dernier : vu début octobre en avant-première en présence de la réalisatrice et deux de ses acteurs (Frédéric Pierrot et Naidra Ayadi), son troisième film a déplacé les foules, peut-être autant pour son aspect sociologique que pour ses qualités cinématographiques, plutôt irrégulières.

Film physique à la volonté "coup de poing", Polisse pourra emporter l’adhésion totale comme un rejet tout aussi entier, on y reviendra. L’idée du film a été inspirée à Maïwenn par un documentaire télévisé et nul doute que cet aspect a pas mal déteint sur le film. Mais il est une chose qu’on ne peut lui dénier malgré tout : l’énergie.

L’énergie de son ouverture qui nous entraîne sans fioritures dès la première scène dans le quotidien agité d’inspecteurs de la BPM, Brigade de Protection des Mineurs.
L’énergie de son regard qui veut embrasser tout le malaise social de notre époque (enfance maltraitée, pédophiles abuseurs, parents dépassés, policiers survoltés, moyens dérisoires).
L’énergie surtout de la troupe d’acteurs qui les incarne avec un engagement et une conviction qui en font le cœur du film.

Outre l'évidence de la présence d’un Joeystarr acteur, animal physique qui magnétise indéniablement l’écran, toute la bande d'acteurs, de l'excellent Frédéric Pierrot en chef de brigade humain au duo d’enquêtrices amies/rivales Marina Foïs-Karin Viard (cette dernière pénible mais juste), la cohésion et l’implication du collectif d’acteurs irrigue toutes les scènes du film, presque un documentaire en lui-même sur la vitalité actuelle du vivier des acteurs français.






Dans ce film constamment immergé dans la violence grandissante de notre société et le chaos personnel d’individus fragilisés (fruit d’un vrai stage de Maïwenn à la BPM), avouons que l’hyper vitalité des acteurs a pourtant du mal à supplanter l’aspect très sommaire de la structure du film qui tient plus de l’écriture télé.
Un enchaînement de séquences, l'une éruptive (souvent un interrogatoire) suivie du quotidien de l’équipe, entre besoin de décompresser et prises de bec répétés avec le chef hiérarchique. Et c’est là que le principe d’énergie peut, sinon se retourner contre le film, du moins en limiter sensiblement la portée.

Maïwenn et sa co-scénariste Emmanuelle Bercot, également actrice, certainement par peur de voir fuir le public si le film affichait un naturalisme trop dur, contrebalancent toute scène éprouvante par un humour (noir) vite systématique, enchaînent engueulades internes régulières et transforment le tout en spectacle haut en couleurs.

Jusqu’à
surligner l’émotion de façon insistante : fallait-il que la scène de l’enfant africain qui pleure dure jusqu’au malaise ou tellement souligner la gêne et l'empathie des agents séparant les enfants des parents dans le camp rom ? Une approche qui veut mettre les spectateurs dans sa poche digne des habitudes télévisuelles, et apparemment ça marche.

Ce qui fait ressembler le film à un pilote de série, tellement revoir ces personnages forts en gueule et intéressants (malgré les poncifs et stéréotypes) pourrait faire la matière d’un programme télé récurrent. On remarquera aussi que malgré son obsession de protéger les enfants, ceux-ci apparaissent trop souvent en arrière-plan d'un récit recentré sur l'étude du quotidien des enquêteurs.

Impulsif et effervescent, "Polisse" est le type de film qui ne devrait pas susciter de réaction intermédiaire : on devrait soit marcher et s’emballer pour la force d’une œuvre carburant à la sensation brute, soit tordre le nez et trouver très limite l’aspect, sinon simpliste, du moins simplificateur d’un film fonctionnant plus à l’effet choc qu’à l’analyse politique subtile.

Permettez-moi de me situer au milieu et de n’éprouver ni l’enthousiasme lu un peu partout, ni le rejet des chichiteux qui critiquent un film trop malin et empathique avec la police selon eux pour être honnête.
Juste déplorer la démagogie parfois gênante de l'ensemble, ses limites cinématographiques, mais d'éprouver un certain intérêt - de citoyen plus que de spectateur d’ailleurs - pour un film-dossier dressant souvent avec acuité un état des lieux parlant sur la situation de tension sociale et de chaos sous-jacent de notre pays.

Une photo d’époque assez fidèle prêtant au débat. Mais sûrement pas le grand film attendu sur les policiers et leur place dans la société, comme avaient su l’être en leur temps "L. 627" de Bertrand Tavernier ou "Le Petit Lieutenant" de Xavier Beauvois, les critiques s’en souviennent-ils ?
Mais qui parle encore de cinéma de nos jours ?



"Polisse" (France, 2011). Sorti le 19 octobre
de ♥ à ♥♥
Réalisation : Maïwenn. Scénario : Maiwenn et Emmanuelle Bercot. Directeur de la photo : Pierre Haïm. Montage : Yann Dedet et Laure Gardette. Musique : Stephen Warbeck. Production : Alain Attal/Arte France/Canal+. Distribution : Mars Distribution. Durée : 127 mn.

Avec : Karin Viard (Nadine) ; Marina Foïs (Iris) : Joeystarr (Fred) ; Nicolas Duvauchelle (Mathieu) ; Karine Rocher (Chrys) ; Frédéric Pierrot (Baloo) ; Maïwenn (Melissa) ; Naidrya Ayadi (Nora) ; Emmanuelle Bercot (Sue Ellen) ; Jérémie Elkaïm (Gabriel).

avis contre sur le monde et partagé pour/contre sur télérama

mardi 18 octobre 2011

La lumière de MY BRIGHTEST DIAMOND

Dans le tir groupé d'albums signés par la gent féminine sorti récemment, c'est finalement la moins exposée qui sort son épingle du jeu. Car ni Zola Jesus avec son "Conatus" très plat, ni "Biophilia" le dernier Björk très ennuyeux (mais quoi de surprenant avec l'islandaise surcôtée) ni le "Ilo Veyou" de Camille, au début séduisant, mais assez décevant car anecdotique, ne marqueront durablement les esprits, enfin le mien surtout.


On est d'autant plus ravi pour Shara Worden a.k.a My Brightest Diamond en découvrant la bonne surprise que révèle "All Things Will Unwind", son troisième album.

Car la jeune américaine ne manquait pas d'attraits en déboulant en 2006 avec sa pop sombre et tourmentée : vibrato de chanteuse lyrique, rock fougueux griffé de tempête électrique, "Bring Me The Workhorse" imposait son caractère, catégorie amazone indépendante, proche d'une Joan As Police Woman.
Un tempérament reconduit sans le même éclat dans "A Thousand's Shark Teeth", son album suivant deux ans plus tard.












Plus apaisé car ouvrant sur d'autres portes musicales largement déployées, ce nouvel opus révèle un vrai changement de décor. Disque de lumière et d'harmonies, "All Things Will Unwind" a été enregistré avec le super-orchestre de chambre yMusic, ensemble que se sont arrachés tour à tour Sufjan Stevens, Antony & The Johnsons, Bon Iver ou encore Son Lux.


Dernière mode de l'indie rock américain ou pas, l'aventure a profité à l'excentrique diva Shara Worden, manifestement épanouie par l'expérience. Tapissé d'arrangements foisonnants de cordes, de bois et de cuivres élégants et joueurs, l'album révèle une luminosité radieuse et émerveillée alors que les arrangements du même ensemble conféraient au superbe dernier Son Lux une magnétique noirceur ténébreuse.

Au croisement de la musique savante et de l'indie pop exigeante, le folk orchestral et raffiné de "All Things Will Unwind" révèle la beauté des compositions de Shara Worden, entre mini-symphonies (l'héroïque Be Brave) et douceur et douleur mêlées (Reaching Through To The Other Side ou le splendide I Have Never Loved Someone inspiré par sa récente maternité).





Pop sophistiquée qui dépasse l'exercice de style, une vraie grâce habite cette parenthèse musicale aérienne inspirée, même si un ou deux titres folk (High Low Middle) semblent plus sages, sonnant un peu comme Madeleine Peyroux ou du Moriarty.

Sensuelle parenthèse sur laquelle la voix de chanteuse classique Shara Worden révèle son caractère unique sans jamais tomber dans la démonstration, mais parant cette ludique aventure d'une distinction constante et irréelle. Une fort belle réussite au caractère addictif, et d'ores et déjà une des bandes-son de cet automne débutant.  
Precious Miss Diamond...

Tracklist :
1. We Added It Up
2. Reaching Through To The Other Side
3. In The Beginning
4. Escape Routes
5. Be Brave
6. She Does Not Brave The War
7. Ding Dang
8. There’s A Rat
9. High Low Middle
10. Everything Is In Line
11. I Have Never Loved Someone

My Brightest Diamond. "All Things Will Unwind" (Ashmatic Kitty) Sorti le 17 octobre
♥♥♥♥
en écoute sur spotify et grooveshark
chronique sur musique-indie et article sur magic

My Brightest Diamond
yMusic

vendredi 14 octobre 2011

Des EP vite fait. DJANGO DJANGO, JAMES BLAKE

Un billet rapide (pour cause d'absence ce weekend) d'EP divers, occasion de recroiser des figures déjà connues ici mais qui donnent de leurs nouvelles en ce mois d'octobre.

D'abord les Django Django, joyeux trio d'excentriques anglais qui pointent le bout de leur nez - à partir du 24 octobre - sous forme d'un "Waveforms EP" en prélude à un premier album qui devrait ENFIN voir le jour.

"Waveforms EP" est surtout la déclinaison d'une chanson (plus trois remixes plutôt bons), l'excellente "Waveforms" qui reprend les choses là où "Love's Dart" et "Wor" les avait laissées il y a un an (lire ici). Toujours cette folie douce entre Beach Boys mutants et fantaisie sonore à la B 52's, les Django Django peaufinent leur style, on espère donc que le LP va voir le jour d'ici peu avec d'aussi bonnes surprises :



Tracklist :
1. Waveforms
2. Drumforms
3. Waveforms (Wild Geese Remix)
4. Waveforms (Mickey Moonlight Remix)

Django Django. "Waveforms EP" (Because Music)
♥♥♥
en écoute sur spotify & Django Django uk et tout Django Django sur spotify

Ensuite le retour du petit James Blake, quelques mois après son premier album si débattu (déjà évoqué ici), qui refait surface avec le EP "Enough Thunder" sous le bras.
L'occasion de voir que le garçon creuse le sillon de son dubstep vocal de plus en plus atmosphérique et gospel. On y croise même un duo avec Bon Iver - toujours obsédé par l'auto-tune! - association surprenante lors d'un titre étrange en apesanteur d'ailleurs disponible en single :



Voilà qui risque encore de diviser mais le petit prince du dubstep a de la réserve, rien que des titres comme "Once We All Agree" et "Not Long Now", soul, sombres et habités, méritent l'écoute.
À vous de voir ensuite si son parcours vous interpelle ou pas.



Tracklist :
1. Once We All Agree
2. We Might Feel Unsound
3. Fall Creek Boys Choir (with Bon Iver)
4. A Case Of You
5. Not Long Now
6. Enough Thunder

James Blake. "Enough Thunder EP" (A&M/Polydor)
♥♥♥
en écoute sur spotify

En espérant que ces deux écoutes charment votre weekend que je vous souhaite le meilleur.

jeudi 13 octobre 2011

I'M FROM BARCELONA a mis le feu à La Sirene !


Hier, c'était le soir des premières fois : premier live de la saison, premier concert des suédois pop I'm from Barcelona et d'abord première soirée où je découvrais La Sirène. Mais vous me direz, qu'est-ce donc que La Sirene ?

Rien moins que l'Espace Musiques Actuelles que La Rochelle attendait depuis longtemps : érigé sur la friche industrielle du port de La Pallice, un bâtiment moderne sur deux étages, avec deux studios de répétition et d'enregistrement, un bar, un club (Le Balcon, 35o places) et une grande salle de concert aux lustres géants et à l'acoustique vraiment excellente (Le Cap, 1170 places)
Lire l'interview de son directeur David Fourrier

Un beau navire flambant neuf pour faire voguer les musiques de toutes sortes au service d'une programmation éclectique (rock, électro, hip hop, folk) mais exigeante : on y attend Asian Dub Foundation, Syd Matters ou bientôt même Patti Smith.

Hier il y avait donc de la fête dans l'air avec la venue de la joyeuse bande de I'm from Barcelona, ex-amateurs devenus pros de l'entertainment indé. La salle s'est remplie gentiment au début pour se retrouver quasi pleine et enfiévrée à l'heure du show des suédois.

Mais j'anticipe un brin car l'ambiance était loin d'être la même lors de la première partie assurée par le duo féminin Mansfield TYA.

Plutôt cold, tendance cold wave et épure minimale, le set de Carla Pallone et Julia Lanöé a exposé sa tension radicale et imposé le respect sans toutefois déchaîner les passions. Normal avec une musique entre électro rêche tendance Anne Clark-Laurie Anderson et punk attitude à la Violent Femmes, le public appréciait l'énergie des demoiselles tout en semblant les craindre un peu, malgré leur humour.
Trop différent de la suite à mon avis, mais à programmer lors d'une affiche plus homogène (album Nyx à paraître).

Car en à peine deux minutes, l'humeur a changé du tout au tout dès l'arrivée des suédois : Emanuel Lundgren et sa bande de joyeux allumés (au moins 15 sur scène!) vous entraînent dans leur sarabande pendant près de deux heures et ne vous lâchent plus.

Une récréation pop qui célèbre la joie de l'instant,
une jovialité communicative sans niaiserie, un happening contrôlé autorisant toutes les fantaisies, les I'm from Barcelona dérideraient sans peine une convention de croque-morts :



Aventure assez inédite, le collectif pop alternatif suédois est un groupe qui peut sembler juste sympa à certains sur disque mais qui prend sa véritable nature en live : une expérience entre happening festif, birthday party d'ados attardés et fête foraine permanente qui tourne au jeté de confettis, lancer de ballons et chenilles endiablées (si, si) :

Vrai remède anti-morosité, la troupe est une vraie démocratie participative demandant la participation active de l'audience, Emanuel Lundgren insistant entre deux chansons sur le fait qu'il ne jouent pas "pour" nous mais "avec" nous. De fait, assister à ce joyeux foutoir sans y participer n'a aucun intérêt et on se retrouve vite à entonner sans complexe leurs refrains simples mais euphorisants en choeur !



Manifestement en verve, la bande fraternelle ne semblait pas pressée d'abandonner la scène et a laissé l'audience conquise et le sourire aux lèvres, mais sur les rotules...
Et dire qu'il rééditent l'évènement tous les soirs de leur tournée française bien remplie, impressionnant ! Toutes les dates de leur tournée ici



Entrée en matière éclatante pour cette première incursion "sirenienne", pas la dernière, car dans un mois, c'est Syd Matters et Tahiti 80 qui reçoivent. Vivement fin novembre !

I'm from Barcelona
/ facebook
La Sirene / facebook

(photos de la sirène sur facebook et sur le site une étoile dans la musette, merci à eux)