lundi 31 janvier 2011

STRANDED HORSE. Du sirocco sur le bocage


Alors voilà un disque que je n'aurai pas écouté sans l'existence d'Internet, et encore plus sans tous les blogs musicaux qui y figurent comme autant de précieux cailloux blancs indicateurs. Déjà une bonne chose, quand parfois il vous (nous) arrive de douter de l'intérêt du web...
Un album hors du temps, hors des contingences, hors des frontières...

La rencontre du bocage normand et des plaines d'Afrique, le musicien Yann Tambour l'a rêvée et développée depuis quelques années sous forme de son projet musical Thee, Stranded Horse (un LP en 2007) et d'une fructueuse collaboration avec Ballaké Sissoko (un EP en 2008), autre maître, avec Toumani Diabaté, de la kora africaine.












Les arpèges de kora - la harpe africaine - cristallins, aériens et éthérés irriguent l'espace sonore, caressants et hypnotiques compagnons incitant autant au grand voyage qu'à un plus intime voyage intérieur. Noces des cordes rêches de la guitare folk et celles délicates de la kora, ce "Humbling Tides" est d'une entière cohérence artistique.

Un projet qui fascine surtout par la qualité de son épure, retirant tout inutile, tout superflu à la musique, la musique de Stranded Horses aspire à une simplicité, une intemporalité, presque une abstraction, conférant un rôle primordial au silence, élément trop souvent négligé dans la musique.
Du coup, après écoute du disque, tout semble vous agresser l'oreille... 
 
Et pourtant, pourtant, je ne m'avoue pas aussi ému, ou autant transporté que beaucoup d'avis lus un peu partout sur des blogs amis et voisins : Hop Blog, Les chroniques de Charlu, Jhiki, Tasca Potosina.

Peut-être est-ce dû à un certain côté uniforme des thèmes, où une nouvelle composition semble être la continuation de la précédente ... Ou plus encore la voix timide un peu blanche, voire sans relief de l'interprète, qui peine à rajouter parfois de l'intensité aux morceaux, détail relevé par le fort pertinent Mmarsu de Little Reviews. Autre avis mitigé sur Le sous-marin jaune

Ainsi, peu convaincu par son chant en français scolairement sous influence "Dominique Anienne" sur deux titres, je me pose des questions sur l'utilité de sa reprise du classique des Smiths (What Difference Does It Make), et me lasse vite du morceau trop monotone "Jolting Moon" aux accents folklore français années 70...

... pour finalement rendre les armes sur les deux titres accompagnés de cordes - violons et violoncelles de Carla Palone et Joseph Roumier - en particulier le somptueux "Shields" où l'alchimie est parfaite entre les accords de guitare, les arpèges de kora et les arrangements magiques de cordes, où chaque coup d'archet est un ravissement. J'avoue de manière générale ne pas résister aux cordes.



Voilà donc un voyage que je ne regrette pas d'avoir effectué, beau parcours en apesanteur au caractère méditatif paru sur le vaillant label bordelais Talitres, tout en déplorant parfois l'aspect plus plat de certaines escales ou l'absence de surprises qui auraient pu épicer l'excursion pour mieux en relever le caractère fort rare.

Mais il est bien possible qu'on se surprenne à refaire l'itinéraire et à y prendre goût.
Qui sait, l'addiction au voyage commence-t-elle à peine ?


Stranded Horse "Humbling Tides" (Talitres Records) ♥♥(♥) paru le 21 janvier dernier à découvrir sur Deezer et Spotify

2 titres en écoute sur la Playlist Automne-Hiver

myspace de Stranded Horse
Talitres.com

vendredi 28 janvier 2011

COMING SOON. Bientôt entre vos oreilles...

Voici un petit choix d'une dizaine de sorties à venir dans l'année 2011, une sélection prospective déterminée en toute subjectivité évidemment, sinon quel intérêt ? Et éclectique : pop, folk, rock, électro, bricolo, dubstep, un peu de tout.

D'abord quelques "hypothétiques", ceux dont on annonce les albums sans savoir quand il sortiront, et si toutefois ils sortiront bien en 2011 :

Le talentueux duo Beach House est d'ores et déjà attendu de pied ferme pour la suite de leur impeccable "Teen Dream" qui fit l'unanimité des tops indé 2010. Chance : on annonce déjà un album à venir chez Bella Union. Quand ? Quel titre ? Quel style ? Mystère et boule de gomme.
Moi, j'aime pas les boules de gomme.

Un extrait de "Teen Dream" :



On espère aussi cette année le deuxième opus des jeunes folkeux amoureux des harmonies vocales, les très attendus Fleet Foxes depuis leur premier album éponyme gracieux de 2008.
Un titre d'album "Helplessness Blues", deux-trois titres de chansons : "Bedouin Dress", "Battery Kinzie" et une vague période de parution chez Bella Union : au printemps.

download gratuit du titre "Helplessness Blues" sur leur site

 Vivement le printemps donc :




Les anglais un peu escrocs de The Big Pink, pour éviter d'être les hommes d'un seul disque, ce "A Brief History of Love" un peu shoegaze et tapageur sorti fin 2009, récidivent avec un album à paraître avant l'été chez 4AD. Vivement l'été pour vérifier. Ah, non, je supporte pas bien l'été c'est vrai. 
Quelques titres : 'England', 'Rubbernecking', '77 Ways To Say No.
 

Un extrait du LP précédent :


Viennent ensuite ceux, moins mystérieux, qui affichent titres d'album et dates de sortie

Ainsi le jeune groupe de folk anglais, Noah and The Whale s'apprête à donner une suite à son beau folk atmosphérique en publiant un "Last Night on Earth" plus pop chez Mercury le 7 mars prochain dont voici un extrait alléchant :

download gratuit du titre "Wild Thing" sur Soundcloud



Nouvelle venue en provenance de Toronto, la jeune Austra s'impose déjà catégorie électro envoûtante, entre The Knife et Fever Ray (logique !) rien qu'avec un imparable single "Beat And The Pulse", disponible le 21 février chez Domino.
Et pourquoi pas un album dans la foulée ?

download gratuit sur Soundcloud




Après 12 ans d'existence avec son plus qu'estimable groupe folk-pop Bright Eyes, le jeune et tourmenté Conor Oberst passe à autre chose, non sans d'abord publier "The People's Key" une ultime livraison à découvrir dès le 14 février et dont voici un avant-goût :



Les amateurs d'électro néo-eighties se pourlèchent déjà les babines : l'anglais Joseph Mount à la tête de son joyeux gang néo-new wave Metronomy débarque vers la mi-avril avec un "English Riviera" sous le bras, publié chez Because Music.

Pour patienter voici l'atmosphérique "She Wants" :



L'hurluberlu islandais auparavant connu sous le nom de Sin Fang Bous avec son inventif album de pop bricolo "Clangour" simplifie son nom pour n'être plus que Sin Fang.
O.K. mon gars, du moment que tu nous sors un nouvel album "Summer Echoes" prévu le 4 mars chez Moor Music aussi bon - sinon mieux, vu les échos élogieux - que le précédent, nous on est content !

En avant-goût "Because Of The Blood

download gratuit de l'extrait "Always Everything"



Et pour terminer, ou plutôt pour commencer car ces 2 albums arrivent incessamment sous peu, deux sorties très attendues au coin du bois

D'abord, celui qui est déjà considéré comme la nouvelle merveille du folk, James Vincent McMorrow publie son premier album "Early In the Morning" fin février.
Ce jeune Irlandais semble rallier les coeurs de ceux qui ont écouté son disque, apparemment prêt à déjà remplacer Ray Lamontagne ? Son EP éponyme sorti fin 2010 chez Believe semble prometteur, mais on vérifiera ça dès le 28 février :







Oubliez les débats récents sur Anna Calvi ou Iron and Wine : celui que déclenche sur la blogosphère le petit prodige anglais du dubstep James Blake, déjà évoqué ici avec ses EP de 2010, avec son premier LP qui débarque dès le lundi 7 février fait déjà grand bruit.

Premier grand disque novateur de l'année ou supercherie musicale ? Je prendrai ma part modeste au débat, mais comme je n'aurai pas la patience d'attendre le 7, une p'tite chronique du Blake par ... Blake ne saurait tarder la semaine prochaine :



Et pour terminer, "The Human Octopus" le très attendu premier album du prodige français Cascadeur initialement prévu ces jours-ci chez Mercury est reporté en mars prochain.
On l'aime déjà beaucoup notre acrobate vocal, mais s'agirait de ne pas trop user notre patience, cher casse-cou :




En espérant que cette petite sélection très très partielle vous ait ouvert l'appétit. Un exercice à renouveler, peut-être ?

source principale : site du NME

jeudi 27 janvier 2011

BRASIL ROCK. Les reprises de Seu Jorge

Dans la même logique de rattrapage, coup de projecteur rapide sur un disque de 2010 qui n'avait pas encore trouvé sa place dans ces colonnes, encombrées de pop & rock indé. Mais ce dernier album du brésilien Seu Jorge mérite bien qu'on s'y arrête un peu, même fort tardivement.

Enregistré avec le trio Almaz (deux musiciens du groupe Naçao Zumbi qui participa du renouveau de la musique brésilienne, et le compositeur de B.O. Antonio Pinto), c'est un album de reprises de haute volée que nous livre le crooner samba-pop à la voix éraillée Seu Jorge.

Ce nom ne vous dit trop rien ? Si vous avez vu l'âpre film "La Cité de Dieu" en 2002 et encore plus le fantasmabuleux "La Vie Aquatique" de Wes Anderson en 2004, vous avez évidemment croisé Seu Jorge, à l'occasion acteur à gueule d'atmosphère quand cela lui chante.














Et dans ce dernier film cultissime* et son indispensable B.O., il était marin muet, mais chantant (!) et s'exerçait déjà à l'art de la reprise en nous gratifiant de versions d'anthologie des grands standards seventies de Bowie adaptés en portugais. Une relecture lumineuse et originale qui lui ouvrit un nouveau public :





Car Seu Jorge n'est pas un quelconque fredonneur de bossa, mais bien un des rénovateurs de la pop brésilienne, à l'instar de Carlinhos Brown, Cibelle ou le groupe électro BossaCucanova. Ancien membre du groupe samba-funk Farofa Carioca, c'est surtout l'album "Cru" en 2004 qui révéla au monde sa voix grave de néo-crooner et son talent pour s'affranchir des formules usées de la samba et du tropicalisme accolés à la musique brésilienne, juste accompagné de sa guitare et développant le tempérament d'un bluesman ou d'un folkeux U.S.

Un disque qui révélait déjà son goût pour la reprise puisqu'on y trouvait du Gainsbourg (Chatterton) ou du Leiber & Stoller (Don't).

Comme on retrouve ici, en-dehors de reprises de classiques brésiliens (Caetano Veloso, Jorge Ben, Baden Powell) de moins attendus titres et artistes complètement revisités, tels que "Girl You Move Me" des Temptations, le "Rock With You" de Michael Jackson ou sa version du "Das Model" des allemands du mythique Kraftwerk !





Et ce qui fait le plus de cet album, peut-être le plus abouti de son auteur, c'est le climat très atmosphérique tissé par ses collaborateurs de passage, entre son de guitares rock psyché néo-70's et ambiance cinématographique au temps suspendu, un écrin parfait pour la voix profonde de Jorge, parfois menaçante, planante ou bien sensuelle sur cette version du classique de Roy Ayers :


Si comme moi cet hiver vous semble un peu longuet, n'hésitez pas à faire un détour par la discographie chaleureuse de Seu Jorge et plus particulièrement cette dernière galette du meilleur aloi, qui brille d'un magnétisme à la fois cool et mystérieux. Qui prouve aussi que la musique brésilienne ne se limite pas à ses clichés et qu'un album de reprises peut se montrer aussi inventif et savoureux qu'un album original.

"Seu Jorge And Almaz" (Now Again Records) ♥♥♥ sur deezer et spotify 


* Ceux qui n'ont pas vu ce film de Wes Anderson n'ont absolument pas d'excuses, mais peuvent aisément combler cette lacune en se procurant ce petit bijou en DVD chez Buena Vista International :

mardi 25 janvier 2011

CINÉMA. Rattrapage 2010. "Dans ses yeux" et "L'Illusionniste"

Si l'actualité cinéma ne m'inspire guère ces temps-ci, la semaine du mini-festival Télérama est du coup tombée à pic. Du 19 au 25 janvier on pouvait en effet (re)voir une sélection de films projetés dans les salles de ciné partenaires de l'hebdo culturel sur tout le territoire. De par chez moi, je suis donc allé découvrir deux films qui m'avaient échappé en 2010...


D'abord "Dans ses yeux", film-surprise de l'argentin Juan José Campanella qui fut l'un des mieux accueillis l'an dernier par le public et la critique - à part Les Cahiers du cinéma, mais qui se soucie de leur avis ? - également récompensé de l'Oscar 2010 du film étranger. À juste titre, car c'est un beau moment de cinéma que ce film constamment passionnant et chaleureux.

L'acteur Ricardo Darin (déjà apprécié dans Les Neuf Reines) y est Benjamin Esposito, un enquêteur judiciaire à la retraite qu'une ancienne affaire, le meurtre atroce d'une jeune femme, hante depuis 1974 et qui s'efforce d'exorciser le passé sous la forme d'un roman qu'il tente difficilement d'écrire.
Un peu comme le journaliste obsessionnel du "Zodiac" de David Fincher, Benjamin s'accroche à son enquête autant pour l'élucider que pour tenter de réécrire sa vie.

"Dans ses yeux"est un film à la construction sophistiquée, entre passé et présent, dans lequel pourtant jamais on ne se perd qui est autant un film dit "policier" qu'un mélo inspiré et une pertinente interrogation sur ce qu'on fait de sa vie...

La valse/hésitation de Ricardo/Benjamin et de sa supérieure Irene, jeune juge campée par la superbe Soledad Villamil forme un magnifique duo, couple balloté par l'Histoire et la justice, le temps et les regrets, coeur battant au frémissement touchant de ce film mêlant subtilement les genres.

Des dialogues vifs et un humour ironique régulier font de ce film caractérisé par une constante humanité une belle réussite peuplée de personnages attachants - savoureux Guillermo Francella en greffier ivrogne attachant - renforcé d'un arrière-plan politique éclairant sans équivoque sur la dictature argentine de l'époque.

En somme, un vrai morceau de cinéma de belle tenue qui confirme bien qu'Hollywood n'a plus depuis longtemps le monopole du grand cinéma romanesque de qualité.

Mon second film rattrapé est un film d'animation, français de surcroît, "L'illusionniste" que l'on doit à Sylvain Chomet déjà responsable des "Triplettes de Belleville" d'heureuse mémoire.
Avec ce nouveau long métrage, il rend hommage au grand Jacques (Tati) en adaptant un scénario inédit écrit à la fin des anées 50 mais jamais tourné par ce dernier.
Hommage affectueux qui prouve l'attachement profond que témoigne ce réalisateur à l'auteur de "Mon Oncle", "L'Illusionniste" est un film d'artisan ouvragé avec patience (sept ans de travail) et délicatesse.
Avec comme personnage principal Tatischeff, un artiste de musical-hall à la silhouette bien connue, qui ne remplit plus les salles avec ses lapins blancs et décide de tenter sa chance à Londres puis en Écosse, "L"Illusionniste" est certainement un des films d'animation les plus mélancoliques jamais réalisés.
Hommage aux artistes anonymes du music-hall auxquels le public moderne a tourné le dos, c'est une fable douce-amère, quasiment muette où l'enchantement du graphisme, des décors et des couleurs pastels atténue la profonde tristesse du propos.
Regard tendre de Chomet qui recrée avec amour une Écosse de lacs et de petites routes perdues dans les montagnes et une ville d'Edimburgh plus vraie que nature, biscornue, chatoyante, intemporelle. Un vrai travail d'orfèvre.
C'est dans ce cocon faussement douillet que vont se nicher notre artiste flanquée d'une naïve jeune fille qui s'est entichée de ce qu'elle prend pour un vrai magicien. Le retour sur terre sera rude et la fin du film assez émouvante.
Fable tendre plutôt contemplative, le film souffre peut-être d'un scénario assez minimal mais compense cet écueil avec l'extrême délicatesse de son atmosphère, son humour tendre souvent bouffon (un certain lapin!) sans omettre son hommage évident au "Feux de la Rampe" de Chaplin, tourné à la même période où Tati écrivit son histoire.
Les inconditionnels du grand Jacques y prendront un plaisir évident mais ce petit bijou subtil ravira ceux pour qui le cinéma d'animation peut aussi être du vrai cinéma et pas juste un divertissement pour les têtes blondes...


Merci au Festival Télérama pour ces séances de rattrapage ciné bien appréciables

vendredi 21 janvier 2011

RETOUR. Keren Ann en images


Bon, depuis bientôt deux mois qu'on l'a découvert, on (je) vais finir par le connaître par coeur le nouveau Keren Ann, ce "My Name Is Trouble" envoyé en avant-goût de son prochain album à paraître bientôt déjà évoqué il y a longtemps chez christorama et Hop Blog.

Plus pop, voire électro-groovy-pop, raffiné et catchy à la fois, qui présage - peut-être - d'une couleur nouvelle dans l'oeuvre de la demoiselle. Car je ne doute pas qu'elle sache avec intelligence renouveler l'univers de son folk mélancolique.

Et pour aider à patienter, voici maintenant que nous arrive le clip à voir tout de suite :

... Alors, classe et sobre, on ne peut pas le nier, et le tout d'une élégance évidente. Par contre, chère Keren, j'ai des doutes sur l'effet de cette chorégraphie maniérée très danse contemporaine, entre Gallotta et Decouflé, exécutée par des danseurs juvéniles à peine pubères ...

Et encore plus par ce nouveau look improbable, cette coupe au bol style "retour de Mireille Mathieu en icône glam ayant abusée du rouge et du mascara"...? Heu, vraiment ?...

C'est sûr, il est bien loin le temps de la petite chanteuse bobo un peu timide de vos débuts, déjà en noir vous remarquerez.

Mais cela ne m'empêchera pas d'attendre avec une impatience non dissimulée cet album "101" à paraître le 28 février

... plus que 38 jours ...


kerenann.com

Bon week-end à tous !

jeudi 20 janvier 2011

FOLK D'HIVER. Iron and Wine

Chronique légèrement en avance - pour cause d'absence le week-end à venir - d'un disque qui ne débarquera que ce lundi 24 janvier prochain.
Un des albums assez attendus en ce début d'année pour qui est sensible au grand paysage mouvant de l'Americana : "Kiss Each Other Clean", quatrième opus d'Iron & Wine, autrement dit l'artisan folk Sam Beam.

Sam Beam vu comme symbole d'un folk intemporel : pour le peu que j'en connaisse, car j'ai peu de recul sur sa musique le connaissant surtout à travers son précédent album "The Shepherd's Dog" paru en 2007.
Mais avouons qu'il est aisé de vite trouver ses marques dans son folk fort limpide bien que cette fois-ci musicalement très élaboré.

Moins fragile et tourmenté que le regretté Elliott Smith, moins insaisissable que Will Oldham/Bonnie Prince Billy, modèle de Bon Iver et des Fleet Foxes, Sam Beam c'est un peu le père tranquille du folk moderne, mais tranquille ne veut pas dire endormi ou manchot.



Pour ce nouvel opus, soignant particulièrement les orchestrations (orgues, percussions, guitare électrique, saxo), tentant des embardées vers une "african pop" au son seventies et développant avec un plaisir évident les choeurs (a-t-il écouté le "Brotherocean" de Syd Matters?) et les rythmes, cet album irradie une constante chaleur et lumière, et respire une vraie harmonie, autant musicalement que dans l'inspiration mélodique.



Le meilleur vecteur en est évidemment sa chaude voix, claire et expressive aux inflexions parfois étrangement similaires à celles de Paul Simon, parallèle évident sur les titres les plus marqués rythmiquement d'inspiration ethnique, voire afro-funk-jazz (Rabbitt Will Run, Monkeys Uptown).

Beam dit avoir voulu réaliser "une musique plus orientée pop qu'auparavant. Que ça sonne comme ce que les gens pouvaient entendre petits sur la radio de la voiture de leurs parents, la musique sympa de la radio des années 70."

Message reçu, résultat assez probant pour ce "soft folk-pop", puisque sans oublier de dégaîner des mélodies si évidentes qu'on croirait les connaître déjà (Tree by The River, Me and Lazarus), il a le mérite de tenter de varier les climats, de la longue transe presque afro- jazz de "Your Fake Name Is Good Enough For Me" à la ballade apaisée "Godless Brother In Love" d'une douceur infinie, ce que j'ai entendu de plus serein et plus touchant depuis longtemps.

J'avoue avoir un faible pour le précédent "The Shepherd's Dog", certainement plus fluide et cohérent dans son ensemble, mais ce nouvel album pop plus hétérogène ne manque pas de charme. Mais je présage déjà que les amateurs d'un folk aventureux plus écorché n'y trouveront pas leur compte et risquent de le trouver trop lisse.

Question de tempérament, Sam Beam, plus proche d'un folk apaisé à la Crosby Stills & Nash, n'aura jamais la rudesse d'un Neil Young, et n'est pas homme à vouloir reprendre la couronne brisée d'un Vic Chestnutt ou d'un Mark Linkous avec Sparklehorse.
Mais avouons qu'il est parfois des cours d'eau paisibles ou l'on peut trouver autant de plaisir à se baigner qu'au milieu de rivières plus tempétueuses.


Tracklist :
1. Walking Far From Home
2. Me And Lazarus
3. Tree By The River
4. Monkeys Uptown
5. Half Moon
6. Rabbit Will Run
7. Godless Brother In Love
8. Big Burned Hand
9. Glad Man Singing
10. Your Fake Name Is Good Enough For Me

Iron & Wine
. "Kiss Each Other Clean" (4AD/Beggars Banquet) ♥♥♥ Sortie le lundi 24 janvier

Iron & Wine en Black Session le 31 janvier chez Lenoir sur Inter et en concert le 17 février à l'Alhambra