vendredi 30 décembre 2011

MON TOP CINÉMA 2011

Autant la richesse de l'actualité musicale a pu donner matière à un Top 50, autant l'année cinéma m'a paru rare en vrais sommets et ne donnera lieu qu'à un petit Top 10 (chroniques d'origine à lire en cliquant sur les titres).

Car, entre rendez-vous décevants (Almodovar, Darren Aronofsky, Christophe Honoré, Bertrand Bonello) et films malheureusement pas vus (Shame, L'Exercice de L'Etat, Incendies, Il Était une fois en Anatolie, Drive, les derniers Scorsese ou Cronenberg), le choix s'est concentré du coup sur un petit nombre de films.
En forme de mince lot de consolation malgré 2 ex aequo, un choix d'oeuvres intéressantes, mais modestes et mineures dans la carrière de leurs auteurs.
Exception faite du quatuor de tête et surtout de son numéro 1, que je considère comme un des plus beaux films de son auteur et de ces dernières décennies, déjà un classique du septième art.

À peine vu en mai dernier, je savais déjà que ce film finirait tout en haut de mon palmarès. Palme d'or de Cannes 2011, autant salué que pourfendu par la critique, le dernier film du plus secret des cinéastes est de loin mon film préféré de l'année et d'ores et déjà film de chevet.
Tellement la beauté de ce film-poème, à la fois épopée cosmogonique et chronique lumineuse sur le deuil, retrouve le chemin des origines et la vocation première du cinéma : l’émerveillement.

Aboutissement du cinéma panthéiste et spirituel de Terrence Malick, ode à la nature et voyage au pays de l’enfance touché par la grâce, The Tree Of Life est un film épique parfois inégal, mais souvent bouleversant, d'un total accomplissement cinématographique. Et d’une liberté absolue qui redonne foi dans le pouvoir d’un cinéma ample et visionnaire :




2. Melancholia de Lars von Trier

Aurais-je jamais prédit qu'un film du cinéaste du Dogme soit un jour dans un quelconque classement personnel ?
Si Lars von Trier ne cède en rien sur le pessimisme foncier, voire la misanthropie qui irrigue son oeuvre, sa fable métaphysique cachée derrière son argument de film catastrophe est un grand moment de cinéma placé sous le soleil noir du romantisme et de la tragédie. D'une beauté plastique rare, on n'oublie pas la tension et la lumineuse noirceur de Melancholia, opéra crépusculaire aux frontières de l'art pompier, mais oeuvre la plus personnelle de l'imprévisible danois.

3. Une Séparation de Asghar Farhadi

Un des films les plus récompensés de l'année, Une Séparation mérite bien tous les lauriers qu'il a reçus.
Vision à la fois collective et privée de la société iranienne sublimée par un scénario, récit et réalisation d'une grande intelligence, le film de Asghar Farhadi réconcilie regard pertinent d'un pays en ébullition et analyse au scalpel des tourments intimes et familiaux sans jamais faiblir en intensité et en suspense. Un tour de force qui mérite tous ces honneurs, le beau succès récolté et un vrai coup de chapeau.

4. Les Géants de Bouli Lanners

Bouli Lanners est belge. Bouli Lanners aime le grotesque et l'absurde de l'existence. Bouli Lanners capte comme personne la vitalité d'un trio d'enfants livrés à la cruauté des adultes.
Bouli Lanners
conjugue élan de la jeunesse et noirceur de sa fable d'apprentissage en conteur consommé. Bouli Lanners filme ses paysages du Nord et ses petits poucets perdus avec la grâce d'un paysagiste américain. Bouli Lanners a bien du talent dans Les Géants. J'aime beaucoup Bouli Lanners.

5. Restless de Gus Van Sant
Sans doute le film le plus mineur de l'oeuvre de Gus Van Sant, ce Restless à la douceur de rêve éveillé a pourtant le charme persistant d'une douce aquarelle. Un Harold & Maude post-adolescent, refuge tendre contre la mort qui guette, où l'auteur d'Elephant conjugue jeux de l'enfance et pudeur digne face à l'inéluctable.
Élégante presque jusqu'au maniérisme, sa fugue élégiaque et irréaliste
distille une belle luminosité jusque dans sa profonde mélancolie. À l'image de la vie.

6. La Guerre Est Déclarée de Valérie Donzelli

Si La Guerre Est Déclarée, récit du réel combat de Valérie Donzelli et Jérémie Elkaïm contre la maladie de leur enfant touche vraiment, ce n'est pas uniquement pour le message positiviste véhiculé par le film, n'en déplaise à ses détracteurs. Mais pour la justesse de son approche entre légèreté et gravité, énergie de combattants et mélancolie de ceux qui ont connu le pire. Un film de survivants, vivant, vibrant, souvent touchant.

Sous prétexte de filmer les coulisses d'une campagne politique imaginaire, Alain Cavalier retrouve l'innocence et la liberté de l'enfance et s'amuse de la prétention du monde du cinéma. Autant objet filmique inclassable et mise en abyme malicieuse, Pater est surtout le film en mouvement permanent de la rencontre touchante d'un cinéaste imprévisible avec son fils rêvé de cinéma, Vincent Lindon.

8. Ha Ha Ha de Hong Sang-soo

Burlesque, tragi-comique et doux-amer, Ha Ha Ha est un régal du cinéma en liberté et arrosé de débordements (sentimentaux ou alcooliques) de Hong Sang-soo, cinéaste coréen décidément revigorant. Malicieux jeux de l'amour et du hasard conquis au final par l'éternel féminin face à des hommes vélléitaires et indécis. Mr Hong est un sage qui a tout compris.

9
ex aequo. Rabbit Hole de John Cameron Mitchell
Film lumineux sur le deuil, Rabitt Hole évite tous les pièges mélodramatiques qu'une oeuvre sur la perte d'un enfant guettait. Misant sur l'épure et le non-dit, John Cameron Mitchell sonde avec acuité un couple aux abois dans ce drame classique à la photogénie de grande classe, servi par une Nicole Kidman au talent retrouvé.

9
ex aequo. Habemus Papam de Nanni Moretti
Alors qu'on s'attendait à une charge antireligieuse de la rencontre entre Nanni Moretti et l'église catholique, Habemus Papam est une fable cocasse et burlesque plus tendre que vacharde. Derrière l'aspect mineur de la fugue inattendue du pape Michel Piccoli (génial comme souvent), une réflexion douce-amère assez désenchantée sur la vanité de tout pouvoir.

10.
Ceci N'Est Pas Un Film de Jafar Panahi
Que fait un cinéaste face à un régime dictatorial qui l'empêche de filmer ? Filmer quand même : filmer son impuissance et son isolement. Filmer pour témoigner. Filmer pour rester digne. Autant acte de résistance que prototype de cinéma malgré tout, Ceci n'est pas un film de l'iranien Jafar Panahi transforme ses manques en atouts et rappelle que l'acte de filmer est surtout un acte de vie.

J'espère, dans mon cas, que l'année 2012 sera plus propice en plaisirs de cinéma en salles obscures. See you very soon!

8 commentaires:

  1. Ah je l'attendais celui-là de Top ! Déjà, pour te remercier à nouveau de parler ciné aussi bien (intelligemment, à la fois avec passion et modération -si je puis dire- car tes avis sont toujours nuancés) Et je n'oublie pas en particulier que, c'est grâce à TA chronique que je suis allé voir "Restless" ! Je retiens donc les sept titres de ta sélection que je n'ai pas vus (les n° 2, 4, 6, 7, 8, 9a et 10) pour les regarder plus tard en DVD.

    Si je devais choisir mes dix préférés parmi la trentaine de films vus en salle cette année, "Une Séparation" tiendrait sans doute la tête du classement (avec "L'Etrangère"). "Restless" et "Incendies" seraient dans ce Top 10, "Habemus Papam" juste au seuil mais pas hélas, "The Tree Of Life" dont je suis sorti aussi émerveillé qu'exaspéré... (des passages sublimes certes -comme l'incipit-, mais aussi de longs moments pénibles voire rédhibitoires -telle la séquence "préhistorique" et numérique juste après ce début si prometteur-)

    Meilleurs voeux à toi également et STP, continue de chroniquer les films que tu vas voir au ciné :)

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  2. pas vu Restless, et ça m’énerve. Ni Ha Ha Ha de Hong Sang-soo d’ailleurs. Sinon je pense que Incendies aurait pu être dans ton top si tu l'avais vu. pour le reste, tu ne loupe rien d'énorme.

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  3. pas la peine de criser pour Restless, Benoit : mignon comme tout, j'ai beaucoup aimé, mais très modeste. Et le style de Hong Sang-soo ne plait pas à tous, donc, pareil, tu ne rates rien de notable... Vivement les films de 2012, vraiment ;)

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  4. @J.P. : très sympa tes gentilles appréciations, ça motive c'est vrai, quand parfois on a l'impression de radoter dans son coin, donc merci beaucoup !!
    "L'étrangère" : encore un dans la longue liste des pas vus, mais faut avouer que celui-là on en a moins parlé. À se recroiser bientôt en 2012 :)

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  5. Hello. Sympa ce top films 2011.
    Je n'ai vu que 3 films sur tes 11 cités : “The Tree Of Life”, “Melancholia” et "La Guerre est déclarée".
    Je n'ai pas beaucoup été au cinéma cette année (20 films vus) et j'ai loupé de grands films !!
    Malgré tout, je compte publier mon top mais, comme pour les disques, sans ordre hiérarchique, plus un panorama de ce qui m'a touché en 2011.

    MA surprise 2011 est : "Poupoupidou" de Gérald Hustache-Mathieu. J'ai aussi aimé "True Grit", "Code Source", "The Tree Of Life", "Un jour" (une grosse surprise aussi car je ne l'attendais pas du tout), "Melancholia"...
    A + et bon réveillon........

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  6. Salut Francky : permets-moi de profiter de l'occasion et te souhaiter à mon tour un bon réveillon et une vraie bonne année 2012, riche en films, disques et plaisirs variés.
    À très bientôt :)

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  7. Bon, il va vraiment falloir que je rattrape mon retard de films de 2011, parce que là-dessus, je suis sérieusement à la traîne.
    En tout cas, bonne année à toi et à ton excellent blog et à très bientôt !

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  8. J'ai vu un reportage, relu plusieurs papiers sur le dernier Jafar Panahi et il me fait de + en + envie. "Ceci n'est pas un film" a l'air d'être un véritable film-manifeste 2.0 post-moderne, lo-fi tout en étant technologique. Une technologie du pauvre. Ce film à l'air d'être une très grande oeuvre formelle et conceptuelle.
    Et ta phrase est magnifique : "...l'acte de filmer est surtout un acte de vie...".

    A +

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