
Jeudi 15, c'était mon dernier concert de l'année à La Sirene mais ce fut encore une belle soirée, malgré les vents furieux qui soufflaient au dehors. Un beau moment d'échange, une parenthèse chaleureuse en compagnie des deux passeurs que sont Piers Faccini et Ibrahim Maalouf. Si l'expression "citoyens du monde" n'était pas si galvaudée à longueur de temps par les médias, c'est quand même celle-là qui leur irait le mieux.


Folk, musique slave, blues africain, latin jazz, occident, orient : ces deux musiciens libres, et amis dans la vie, métissent tout avec gourmandise et on les suit sans hésiter avec le plaisir de les voir brasser avec autant de générosité toutes les racines qui ont nourri leurs musiques.

On comprend vite pourquoi : immédiatement sympathique, tchatcheur, jovial, et surtout très très grand musicien. De l'or au bout des lèvres dès qu'il souffle dans l'instrument et soulève une foule de sentiments, entre spleen méditatif, souffle spirituel et appel de la beauté. Une réputation non usurpée :
Seul problème pour ce spectacle souvent détonant : je ne suis pas vraiment adepte de la formule jazz-rock électrique choisie par Ibrahim dans ces lieux, entouré de musiciens virtuoses (Frank Woeste au Fender Rhodes, François Delporte à la guitare électrique, Laurent David à la basse et Xavier Rogé à la batterie).
Virtuoses, mais assénant une énergie très hard rock, avec riffs de guitare heavy metal, batterie en plomb à en faire vibrer le sol (!) et longs solos magistraux mais ennuyeux à la longue de chacun, qui contrastait avec la dentelle du jeu, digne du grand Jon Hassell, du trompettiste Maalouf.
Lequel se permettait tout : taquiner le clavier en blaguant sur Vincent Delerm, jouer le musicien schizophrène, revisiter la musique bretonne et surtout, atteindre au superbe sur un "Beirut" déchiré et émouvant, grand moment de son album "Diagnostic" et de ce concert :
Hormis cette divergence esthétique, voilà un homme d'une énergie et générosité emballantes. En témoigne le moment où il partageait la scène avec Piers Faccini au chant, chacun manifestement honoré de la présence de l'autre, ce dans le concert de chacun. Bel exemple d'admiration mutuelle.
Une soirée qui avait de toute façon débuté sous les meilleurs auspices, ceux du timbre voilé du folkman anglo-italien : entendre sa voix a capella entonner un blues d'esclave américain dans une salle plongée dans le noir et résonner d'un écho spirituel à filer le frisson donne le ton de ce concert magnifique.

Signe d'un concert réussi, la set list enchaînait avec des titres plus rapides et plus âpres, histoire de montrer que la voix douce de Piers Faccini cache aussi un vrai showman capable de remuer son audience, parlant à l'occasion avec respect avec le public. Et un orfèvre musical entouré d'excellents complices (très bons batteur Simone Prattico et violoniste Rodrigo d’Erasmo).



Photos du groupe : © Stéphane Schmutz www.stemutz.ch
Le moment où Ibrahim Maalouf apparut pour illuminer "The Beggar & The Chief" de ses volutes magiques ne faisait que confirmer ce que tout le monde (j'espère) avait perçu : le temps d'un soir, La Sirene était en lévitation entre ciel et terre, sur un petit nuage de partage et de grâce.
Un avant-goût de la période de Noël peut-être, ou un répit pacifique offert par deux hommes de bonne volonté. Diablement efficace alors, car la tempête qui soufflait encore à la sortie n'a pas réussi à me l'enlever. Merci à eux deux.
À retrouver, l'un sur son recommandable album "Diagnostic" et l'autre sur l'IN-DIS-PEN-SABLE "My Wilderness"


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