mardi 29 novembre 2011

Le rêve blanc de KATE BUSH

Décidément après Youth Lagoon, nous voilà encore plongés musicalement en plein hiver, celui qui ne tardera pas bientôt à venir réellement nous envelopper, saison oblige.

Un disque qui a pourtant failli être négligé, car sorti en plein break prolongé du blog. Ensuite car c'est le deuxième cette année d'une artiste pourtant fort rare, après son "Director's Cut" sorti au printemps, relecture inutile de ses travaux antérieurs qui avait laissé un goût de déception.

Car si même la légendaire Kate Bush se retournait sur son passé pour maladroitement remaquiller ses anciens titres, j'ai volontairement laisser traîner l'écoute de cette nouvelle livraison pour éviter la déception et l'idée qu'elle n'avait rien de neuf à offrir.
Évité pas bien longtemps, je l'avoue et bien m'a en pris : car comme un train peut en cacher un autre, ce deuxième était le bon et son meilleur disque depuis bien longtemps.

Vrai nouvel album de la diva extravertie de la pop des années 70/80 devenue ermite à la production raréfiée, "50 Words For Snow", rêverie thématique autour de l'hiver, la neige et la blancheur se révèle un vrai monde contenu en sept plages inédites remplies de blanc et de silence, de temps retenu et de pulsations vitales.

Renouant avec (et dépassant) la notion d"album concept" chère aux années 70 qui l'ont vu éclore, la belle anglaise, accompagnée du grand batteur Steve Gadd, se paye le luxe de déployer le temps le long de longues plages feutrées et coconneuses sur "fond sonore de chute de neige" en susurrant de sa voix d'ensorceleuse d'étranges histoires d'amours métaphoriques, d'esprits neigeux et d'homme des neiges pourchassé :



Troublante première plage résonnant d'un piano assourdi où le grain un peu volé de sa voix mûrie par l'âge habille sa musique d'une sobriété qui la rend immédiatement accueillante et surtout plus profonde.
Ainsi, le trio des splendides premiers morceaux (Snowflake, Lake Tahoe, somptueux Misty) qui ouvrent ce disque en apesanteur évoque l'épure musicale aux pulsations jazz vers lesquelles tendaient Talk Talk et Mark Hollis et les arrangements minimalistes chaloupés des morceaux suivants renvoient au meilleur de la  pop moderne (50 Words For Snow avec le so british acteur Stephen Fry répondant à sa voix unique de fée, un régal) :


Un écrin sonore ouaté entre progressif vintage et classicisme inspiré, une production en fait intemporelle qui ne semble pas (ou plus) se vouloir innovante, mais juste belle et accomplie. Et que même la présence surprenante mais convaincante d'Elton John en duo sur un titre ne parvient pas à éclipser.

Joli retour arty apaisé qui rappelle à toutes les prétendantes au trône de diva pop incontestablement inventé par leur grande soeur (grand-mère) Kate que le chemin sera encore long avant de la remplacer. Car celle qui inspira par sa liberté un nombre incalculable d'artistes féminines indépendantes, de Liz Fraser des Cocteau Twins à My Brightest Diamond ou Glasser - en passant aussi par une certaine islandaise devenu soulante - ne semble pas, pour notre plus grand plaisir, encore décidée à céder sa place.

Réjouissante nouvelle qui, en dehors du plaisir de ces retrouvailles inattendues, peut laisser présager à l'avenir de bonnes surprises, d'autant qu'elle prévoit de renouer à moyen terme avec la scène.

Tant que tu réussiras à montrer l'étendue de ton imprévisible talent, Dear Kate, on est prêts à t'attendre, même plusieurs hivers sous la neige.

Tracklist :

1. Snowflake
2. Lake Tahoe
3. Misty
4. Wild Man (with Andy Fairweather from Low)
5. Snowed In At Wheeler Street (with Elton John)
6. 50 Words For Snow (with Stephen Fry)
7. Among Angels

Kate Bush. "50 Words For Snow" (Noble & Brite/EMI) sorti le 21 novembre
♥♥♥♥
en écoute sur spotify et deezer
à lire sur les chroniques de charlu et christorama
articles sur télérama et les inrocks

site de kate bush

4 commentaires:

  1. ...qu'il me fut drôle de lire cette retenue à l'écoute, portant un même jugement sur la sortie de ce nouvel album. Puis de découvrir ta chronique..."Merde, suis peut être entrain de laisser passer qq chose!!!" donc, des suites de ta lecture, de me précipiter et...Déception! N'ai rien su retrouver de tes mots à l'écoute, d'y trouver la même "inconsistance" que dans ses précédents opus.Sa voix de la savoir sublime, mais c'est quand elle se lâche d'une certaine folie qu'elle sait m'envouter, et là, de n'y trouver que qq belles histoires sans plus de saveur, une jolie rose, mais sans épines...

    RépondreSupprimer
  2. Alors là, c'est vraiment que du ressenti subjectif car c'est justement ce (faux) calme, ce jeu avec le silence (la neige qui tombe), sa voix frôlée et la longueur des morceaux un peu hypnotiques qui me séduit.
    Personnellement, je me réjouis de ne pas la voir rejouer les harpies à la "Babooshka" et sous un classicisme apparent de continuer son parcours onirique et sa recherche de la beauté.
    Très personnel tout ça, mais dans mon cas la magie a opéré, donc voilà :)

    RépondreSupprimer
  3. ...Babooska n'étais pas la référence à laquelle songeais, mais plutôt à "Running up That Hill", où elle joue subtilement de diverses tonalités, dans l'idéal, c'est dans un registre à la "Marina & the Diamonds" que la verrai volontiers et c'est quelque part un regret de n'avoir pu y ressentir aussi de la magie.

    RépondreSupprimer
  4. probablement son meilleur album depuis longtemps. Tout en finesse malgré des atteindes de notes suraigüe (dans les premiers morceaux) Un disque de prog à chialer tellement c'est beau ! Une voix différente de d'habitude, plus posée, plus précises, plus envoutante. Tant pis pour ceux qui ne peuvent pas comprendre, le niveau est trop haut. Avec en plus des disconnances admirablements travaillées !

    RépondreSupprimer