vendredi 7 mai 2010

CINÉMA. Les marivaudages coréens de Hong Sang-soo

On reste encore un peu dans l'ambiance cannoise de la précédente chronique. En effet, sera bientôt projeté dans la sélection Un Certain Regard, le dernier film du cinéaste coréen Hong Sang-soo, nommé "Ha Ha Ha", un titre pas difficile à traduire, au moins.

Alors que son opus précédent, "Les Femmes de mes amis", est sorti tout juste cette semaine sur les écrans français. Mystères de la distribution, car c'est un film que j'ai pourtant pu voir il y a presque un an sous un titre anglais "Like You Know It All", fin juin 2009 dans ce festival dont je vous ai déjà parlé.

L'entrée en matière avait en plus un écho certain dans ce contexte festivalier, l'argument du film étant l'arrivée de Ku, réalisateur de films d'auteur, dans un festival d'art et essai comme membre du jury. Peu motivé par sa tâche, perdu affectivement, s'endormant aux projections (ça, c'est du vécu, je vous le dis), il renoue avec un ancien camarade et rencontre ensuite la femme de celui-ci.

Hong Sang-soo est un drôle d'oiseau, un cinéaste nourri à la nouvelle vague française (Bresson, Rohmer surtout) et fort travaillé par les histoires d'amour chaotiques, souvent à trois personnages, le sexe et l'alcool.
En effet, les scènes alcoolisées reviennent régulièrement dans le cinéma funambulique et burlesco-mélancolique de ce coréen taciturne, comme dans "La Femme est l'avenir de l'homme" dont je me rappelle bien les scènes de beuveries homériques des deux personnages principaux.

"Les Femmes de mes amis" est du même tonneau (hum), à l'évidence d'inspiration autobiographique quoique d'un ton plus léger. Le cinéaste, par l'intermédiaire de son double, joué par le réjouissant acteur Jung-woo Ha, ne se fait pas de cadeau, se montrant comme un artiste très égotiste, amer de ne pas être devenu un réalisateur-star, s'adonnant à la boisson et affectivement plutôt immature.

J'avoue que le film fait souvent mouche avec ce anti-héros dépassé par le monde (scènes drôles et bien vues où on le voit tenter, sans succès, d'expliquer son cinéma à des étudiants manifestement pas convaincus) ou dans sa critique non voilée des défauts d'un micro-milieu spécialisé, auteurs, critiques et directeurs de festivals inclus.

Même si tout cela tourne un peu en rond et peine à maintenir l'intérêt, en se perdant dans les affres sentimentales, morales et maritales du trio vers la fin. Des scènes un peu longuettes, comme le film qui fait sans doute vingt minutes de trop.
Tous les films de Hong Sang-soo (ou Hang Sangsoo, ça dépend des écoles et, non, je ne parle pas le coréen) racontent d'ailleurs plus ou moins la même histoire, celle d'artistes souvent inadaptés, nostalgiques, maladroits en quête d'affection et se raccrochant le plus souvent à leurs bouteilles pour se consoler.

C'est bien pour un auteur d'avoir un univers mais encore mieux pour les spectateurs de ses films de penser à le renouveler un peu. Peut-être avec le prochain, ce "HaHaHa" cannois ? Quel titre, je ne m'y fais pas.

"Les Femmes de mes amis" (ex-Like You Know It All) (Corée du Sud, 2009). Réalisation : Hong Sang-Soo. Durée : 126 mn. Avec Jung-woo Ha, Ko Hyeon-jeong, Tae-woo Kim. Sorti depuis le 5 mai.
La bande-annonce du film :
Et, impatients que vous êtes, voici pour vous une photo en avant-première de "Ha Ha Ha" :
Remarquez qu'on y boit encore. Du coup, nous voilà bien renseignés, c'est sûr.

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