mercredi 18 août 2010

CINÉMA. British Summer. Stephen Frears et Michael Winterbottom


Alors que l'été est une saison souvent pauvre en sorties cinéma, cette année on trouve quand même pour étancher sa soif de cinéphile - hormis l'immanquable "Inception" évoqué ici - des films signés par des cinéastes réputés : ainsi les derniers opus des très British Stephen Frears et Michael Winterbottom, "Tamara Drewe" et "The Killer Inside Me".

Avec son nez refait, son job dans la presse people et sa facilité à briser les coeurs, Tamara Drewe revient dans le village de son enfance : bobos et ruraux, auteur de best-sellers, rock-star ou fils du pays, tous sont attirés par Tamara dont les choix amoureux vont provoquer un enchaînement de circonstances absurdes.

Vu un peu par hasard et sans réelle conviction, "Tamara Drewe" de Stephen Frears - qui s'était égaré avec son adaptation académique de "Chéri" - ressemble à première vue à une caricature des anglais vus par le reste du monde : verte campagne cosy, petits-bourgeois envieux, marivaudages et tromperies... un univers déjà bien arpenté par la littérature et le cinéma anglais.


Et, pour cause, le film est l'adaptation d'une bande dessinée de Posy Simmonds, elle-même transposant parodiquement "Loin de la Foule Déchaînée", un classique du XIXème de Thomas Hardy.

Une satire acide et assez drôle - les anglais ont de l'esprit, quoi qu'on en dise - d'un petit monde d'écrivaillons et de villageois frustrés, entre citadins parvenus et ruraux empêtrés dans leurs impasses amoureuses et leurs ambition sociales.
Et menée sans temps mort et filmé avec une verve certaine par un Frears qui semble se réjouir de ce petit théâtre cruel.

Avouons que l'aspect boulevardier du film, le côté caricatural des personnages et son parfum caustico-frivole m'ont laissé un peu sur ma faim à la vision du film.
Mais, pour peu qu'on l'acccepte pour ce qu'il est - une tragi-comédie pétillante, plutôt "light", mais aux changements de tons réjouissants et tout simplement drôle - "Tamara Drewe" vieillit bien et laisse un agréable petit souvenir.

Parfait pour aérer nos neurones un peu au repos l'été... sans oublier les paysages du Dorset filmés dans une lumière chaude magnifique et une troupe d'acteurs parfaits, les femmes en tête : Tamsin Greig très juste en épouse meurtrie et la bombe Gemma Arterton, belle et touchante à la fois.

Et puis après, vous ne verrez plus un troupeau de vaches de la même façon... Aucun rapport avec la photo ci-dessous, ceux qui verront le film comprendront !

Tamara Drewe (Grande-Bretagne, 2010). Réalisation : Stephen Frears. Scénario : Moira Buffini d'après la bande dessinée de Posy Simmonds. Chef-Opérateur : Ben Davis. Musique : Alexandre Desplat. Production : BBC Films. Durée : 109 mn.
Avec : Gemma Arterton (Tamara Drewe), Dominic Cooper (Ben Sergeant), Bill Camp (Glen McGreavy), Roger Allam (Nicolas Hardiment), Tamsin Greig (Beth Hardiment).
Sorti le 14 juillet 2010.



La bande-annonce :


Changement complet de décor avec "The Killer Inside Me", adaptation d'un polar noir de chez noir de Jim Thompson (auteur de Série Noire, Les Arnaqueurs, Coup de Torchon).

Texas, années 50: shérif adjoint, Lou Ford est un homme charmant et efficace, apprécié de tous, l'un des piliers de la communauté. Aussi séduisant soit-il, il connaît toutefois quelques problèmes avec les femmes et la loi. Les meurtres se multiplient dans sa petite ville du Texas et on ne tardera pas à découvrir que c'est lui qui en est l'auteur...

Plus américain comme ambiance, décor et thème, on ne peut pas. Mais c'est l'anglais Michael Winterbottom - très prolifique réalisateur de films très divers, entre docu-fiction mondialisé (In This World) ou drame familial intime (Un Été Italien) - qui a réalisé cette virée aux côtés d'un psychopathe, un vrai de vrai, de ceux qu'affectionne le cinéma américain depuis longtemps.
Un tueur d'autant plus troublant qu'il emprunte les traits rassurants de Casey Affleck, l'acteur qui monte, quasiment de tous les plans de ce film qui se présente comme une plongée asphyxiante au coeur du Mal incarné, mystérieusement protégé par son entourage.

Une composition glaçante avec sa voix douce chuchotée (l'accent est un poil appuyé par contre), sa gueule d'ange et son air supérieur, qui donne toute la démesure de ce tueur pervers sans limites.
Dommage que le film ne soit pas à son niveau et que son auteur n'en ait pas, lui, de limites...

Car, pour Winterbottom cela ne reste qu'un - parfois séduisant - exercice de style "polar tordu", dont il ne filme ici que les clichés rebattus : décorum années 50, galerie de péquenots affreux, tractations inutilement embrouillées de notables corrompus, non-psychologie du meurtrier se voulant "signifiante", mais qui traduit en fait son non-regard sur le sujet.


En fait, tout semble tourner autour de ces deux trop longues scènes de violence éprouvante, où les femmes sont des punching-balls qui disent encore '"Je t'aime" même presque mortes - pauvres Jessica Alba et Kate Hudson, pas gâtées par leur rôles de victimes passives - une violence aveugle volontairement extrême d'accord, mais révélateur chez Winterbottom d'un côté "épate-bourgeois" bien limité.
Résultat des courses : un film hybride et plutôt vain, presque désagréable, au final de plus très grand-guignol qui achève le tableau. Dommage pour la performance de Casey Affleck.
Un produit comparable au Canada Dry, qui fait penser à ..., mais très éloigné des réussites des frères Coen (No Country For Old Men) ou de la vraie réflexion de Cronenberg sur la contamination de la violence (History of Violence).
Et qui, du coup, sur ce coup-là, me fait reconsidérer comme un cinéaste assez opportuniste ce Winterbottom qui croit pouvoir tout filmer.

Désolé, mais n'est pas Kubrick qui veut, Michael ...

The Killer Inside Me (Grande-Bretagne, 2010). Réalisation : Michael Winterbottom. Scénario : Jim Curran d'après Jim Thompson. Chef-Opérateur : Marcel Zyskind. Musique : Joel Cadbury. Production : Morena Films/Wild Bunch. Durée : 105 mn.
Avec : Casey Affleck (Lou Ford), Jessica Alba (Joyce Lakeland), Kate Hudson (Amy Stanton), Ned Beatty (Chester Conway), Elias Koteas (Joe Rothman), Brent Briscoe (L'étranger), Simon Baker (Howard Hendricks).
Sorti le 11 Août 2010.



La bande-annonce :

Alors, comédie rurale ou thriller sanglant, à vous de choisir maintenant...

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