dimanche 18 mars 2012

REVOLVER et THE SHINS : les mirages de la perfection pop ?

On sait que passer l'épreuve du deuxième album n'est pas chose aisée et les jeunes musiciens de Revolver n'échappent pas à la règle.
Vite révélés en 2009 avec leur premier opus intimiste Music For A While, leurs harmonies vocales et leur refrains à l'unisson, le trio parisien avait, à défaut de rien inventer, l'avantage de leur très grande jeunesse, la joliesse pop et la délicatesse harmonique, héritage de leur éducation classique. 
Vus en concert, malgré les risques d'une maladresse occasionnelle, Revolver respirait à la fois la timidité et la fraîcheur des premiers pas, la promesse des lendemains, en émules juvéniles des Beatles ou Donovan.

Devenus un enjeu commercial vu le succès de leurs 100 000 albums vendus, les trop gentils Ambroise, Jérémie et Christophe ont beau avoir intitulé la suite Let Go, on attend encore en vain le "lâcher prise" promis. Plus formatée et banalisée, leur musique de jeunes gens sages confié aux (mauvais) soins du producteur Julien Delfaud les voit enfiler l'ordinaire et le tout-venant des habits pop, en vagues photocopies de Phoenix (trop lisses Wind Song ou Brothers). Du nanan pour les radios grand public :



Distillés mollement sous l'étouffoir d'un vernis lisse sans saveur où rien ne dépasse, les titres de Let Go, obsédés par une certaine perfection pop, procure plus l'ennui qu'autre chose. Et confirment le risque de fadeur inhérente des compositions des garçons, la trop grande gentillesse ou inoffensivité de leur politesse de bons élèves. On sauvera toutefois un Losing You d'inspiration Crosby Still Nash & Young ou un Cassavetes plus americana qui laisse entrevoir ce que le groupe aurait pu faire la bride moins sur le cou.

Bon, on réécoute mieux les Fleet Foxes - qu'ils adorent mais dont ils sont très loin - on vit un peu, et on revient avec un peu d'expérience et une approche plus mûre. Sinon, on vous zappera vite, les gars !

Revolver. Let Go (EMI Music) paru le 12 mars

spotify & deezer
avis pour sur les inrocks, contre sur magic et déçu sur pop revue express


L'immaturité n'est pas ce qui menace James Mercer, l'homme étant auteur à la tête de ses Shins d'une jolie discographie, dont l'inaugural Oh, Inverted World en 2001 ou le petit sommet pop Wincing The Night Away de 2007.
Révélé à tous par la ballade New Slang sur la bande-son du film culte Garden State, le talent mélodique, la précision instrumentale et la voix de vocaliste hors pair du one man band sont autant d'éléments de choix dans un parcours toujours mouvant. Même si la parenthèse Broken Bells avec Danger Mouse avait prouvé sa capacité à changer d'univers, on avait envie de le retrouver depuis ses longues années.


Chose faite avec un retour aux affaires comme pilote de son navire principal : The Shins réappareillent pour un retour au port (Port Of Morrow). Si ce quatrième volume qui sort demain célèbre nos retrouvailles avec sa pop liquide soignée, ces  mélodies à tiroirs et une maîtrise intacte, avouons aussi que, survenant après son inventif opus pop de 2007 qui le voyait réinventer son groupe néo-sixties en groupe moderne entre ombre et lumière, Port Of Morrow paraît en  agréable, mais évident pilote automatique.

Ainsi, victime de sa volonté d'efficacité, Mercer semble se réfugier derrière une grosse production immaculée dont témoigne l'aspect nouveau riche du single Simple Song


Sévérité de notre regard, mais qu'on aurait accepté de la part d'autrui ? Surtout l'aspect fondamentalement décousu d'une collection de titres anciens qu'il avoue avoir accumulé au fil du temps, d'où le côté inégal d'un recueil de chansons sans vrai unité artistique.
Le disque, s'il comporte faiblesses ou facilités (No Way Down, It's Only Life) affiche cependant aussi mélodies catchy (Bait And Switch, 40 Mark Strasse) ou trouvailles inspirées (Port Of Morrow, le titre) :



Ce qui déçoit en fait, c'est son aspect plutôt anecdotique en regard de ses capacités, et surtout l'obsession sonore et de la perfection clinique dans lesquels Mercer semble s'être installé. Des pièges qui menacent de scléroser son inspiration et surtout limiter son champ d'action et notre intérêt. La perfection peut être voisine de l'ennui, en musique comme dans la vie.

Allez, on médite et dort là-dessus, une nouvelle semaine s'annonce !

The Shins. Port Of Morrow (Rural Apothecary/Columbia Records) parution lundi 19 mars
entre ♥ et ♥♥
écouter sur spotify & deezer
avis pour sur la quenelle culturelle et mitigé sur les inrocks 

2 commentaires:

  1. Je suis assez d'accord avec toi, surtout sur Revolver. J'avais beaucoup aimé l'originalité du premier album, et je trouve que le second en perd beaucoup.
    Dommage...
    Puisque c'est ça, je vais réécouter Django Django ;)

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  2. Là Céline, y a pas photo entre les jubilatoires anglais et nos trop proprets petits français ! Bien raison ;)

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